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Le Kazakhstan à la Berlinale : une plongée dans la réalité du pays récompensée par plusieurs grands prix

Trois films kazakhs ont été présentés à la 72ème édition de la Berlinale, et deux d’entre eux ont reçu une récompense. La diaspora kazakhe a organisé à cette occasion des manifestations pour encourager le public européen à s’intéresser de plus près à la situation politique du pays.Novastan reprend et traduit ici un article publié le 4 mars 2022 par notre version allemande. La 72ème édition de la Berlinale s’est tenue du 10 au 20 février 2022. Elle a invité à se plonger à Berlin dans la réalité de la vie au Kazakhstan. Trois films sélectionnés en compétition offraient un panorama critique d'une société partagée entre modernité et tradition, entre violence et poésie.

Berlinale Kazakhstan Baqyt
Une capture d'écran du film Baqyt, projeté à la Berlinale.

Trois films kazakhs ont été présentés à la 72ème édition de la Berlinale, et deux d’entre eux ont reçu une récompense. La diaspora kazakhe a organisé à cette occasion des manifestations pour encourager le public européen à s’intéresser de plus près à la situation politique du pays.Novastan reprend et traduit ici un article publié le 4 mars 2022 par notre version allemande. La 72ème édition de la Berlinale s’est tenue du 10 au 20 février 2022. Elle a invité à se plonger à Berlin dans la réalité de la vie au Kazakhstan. Trois films sélectionnés en compétition offraient un panorama critique d’une société partagée entre modernité et tradition, entre violence et poésie.

Dans la section Panorama, le grand prix du public pour la catégorie long-métrage est revenu à Baqyt (le bonheur, en kazakh). Le personnage principal du film est une femme d’affaires prospère présentant au travail l’image d’une femme heureuse qui a réussi. Mais face à sa fille, elle se montre froide et impitoyable. Et au domicile conjugal, c’est la violence du mari qui prédomine. «Le sujet de ce film a une portée sociale, il parle du Kazakhstan, mais concerne aussi tous les pays : il s’agit des violences domestiques récurrentes », commente Askar Ouzabaïev, interviewé par la chaîne de télévision russe Mir.

Trois films, deux prix

Dans la section Génération, le grand prix du jury international a été décerné à Skhema (schéma, en russe) dans la catégorie du meilleur film. Le réalisateur Farkhat Charipov s’était déjà fait connaître dans le Kazakhstan post-soviétique par deux films sur la jeunesse. Selon le magazine en ligne Orda.kz, il place pour la première fois dans Skhema un personnage féminin au centre du film et analyse la thématique complexe du passage à l’âge adulte des adolescents modernes. Il aborde aussi le sujet du pouvoir de l’argent dans une société tournée vers la consommation. Le film Akyn (le poète, en kazakh) du réalisateur Darejan Omirbaïev pose la question du rôle de l’art dans une société dominée par la technologie moderne et la consommation de masse, retraçant le parcours d’un poète dans un monde où la poésie trouve peu d’écho. En réfléchissant au destin tragique du poète contestataire du XIXème siècle Makhambet Otemisouly, il est bouleversé de constater combien la vie des poètes a toujours été fragile et difficile, commente Inform.kz. Lire aussi sur Novastan : Où se situe l’Asie centrale sur la carte du cinéma mondial ? Le scénario d’Akyn se fonde sur la nouvelle de Herman HesseSoirée d’auteurs. Le film n’a pas obtenu de récompense à la Berlinale. En revanche, il a été primé en 2021 au festival international du film de Tokyo dans la catégorie meilleure réalisation.

La diaspora tente d’informer sur les troubles de janvier

En dehors des cinémas, plusieurs protestations organisées par des représentants de la diaspora kazakhe ont accompagné cette édition de la Berlinale. Au gala d’inauguration et lors des premières d’Akyn et de Baqyt, un petit groupe de personnes se tenait à l’extérieur en agitant des pancartes indiquant : « Stop à la terreur au Kazakhstan » et «Tournons les yeux vers le Kazakhstan ». Leurs habits traditionnels kazakhs blancs barbouillés de rouge constituaient aussi une manière de protester. « Nous avons voulu informer le monde entier de ce qui se passe au Kazakhstan », déclare Raouchna Tolganbaïeva, une participante des manifestations. Ces actions doivent selon elle attirer l’attention sur la situation au Kazakhstan depuis les événements de janvier 2022 au cours desquels, selon les données officielles, 227 personnes ont été tuées et des milliers d’autres blessées, d’autres encore arrêtées. Lire aussi sur Novastan : Kazakhstan : nouveau gouvernement et retrait des troupes étrangères Lors de la première d’Akyn, Dina Nourpeïssova, qui avait déjà organisé une première manifestation le 7 janvier à Berlin, a déclaré devant le cinéma Delphi : «Nous saisissons cette occasion pour interpeller tous ceux qui s’intéressent au Kazakhstan et veulent voir ce film : nous voulons leur montrer la situation actuelle du Kazakhstan alors que les grands médias s’en désintéressent ou n’informent que superficiellement. »«Nous saisirons toutes les opportunités pour parler des événements qui se passent actuellement au Kazakhstan. Car les médias libres sont sous pression. Nous avons des informations directes en provenance d’activistes du Kazakhstan. Il y a des listes de personnes arrêtées, torturées, parmi lesquelles il y a des mineurs », continue-t-elle.

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«Je ne suis pas une personne politisée. Mais je suis ici parce que j’ai honte. Parce que j’en ai assez de fuir. Parce que je ne veux pas me réveiller dans dix ans pour constater que mon pays a été pillé et qu’une saloperie pareille, passez-moi l’expression, continue de s’y produire », déclare Kamar-Soulou Atretkhany, 29 ans. Elle a émigré à 18 ans du Kazakhstan et vit actuellement à Berlin.

Le thème des travailleurs migrants

Les autres pays d’Asie centrale n’étaient pas représentés lors de cette 72ème édition. Mais les travailleurs migrants d’Asie centrale sont le sujet d’un film russe. Dans Prodoukty 24 (ou Conveniance store au festival), le réalisateur Mikhaïl Borodine décrit les conditions de travail de migrants comme un esclavage moderne, ce film-choc reposant sur des faits réels. Moukhabat, une jeune femme ouzbèke, travaille dans un supermarché moscovite, vivant dans une arrière-boutique qu’elle partage avec d’autres travailleurs immigrés, constamment sous la surveillance de la propriétaire du magasin. Le caractère sans issue de leurs conditions de travail apparaît clairement lorsque l’une de ses collègues tente de prendre la fuite et qu’elle est ramenée de force par la police locale, de mèche avec la propriétaire. Ce n’est que lorsque Moukhabat se voit retirer la garde de l’enfant qu’elle a mis au monde que l’histoire prend un tout autre tour.

Olga Janzen Rédactrice pour Novastan

Traduit de l’allemand par Bruno Cazauran

Édité par Paulinon Vanackère

Relu par Emma Jerome

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