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Quelle politique américaine en Asie centrale sous l’administration Joe Biden ?

Dans un entretien, l’ancien ambassadeur américain George Krol définit les priorités de l’administration Joe Biden en Asie centrale. Il ne s’attend pas à des changements radicaux, mais compte sur une plus grande attention à la région.

Astana George Krol Kanat Bozoumbaïev
L'ancien ambassadeur américain au Kazakhstan George Krol et l'ancien ministre de l'Energie Kanat Bozoumbaïev lors de l'anniversaire de l'indépendance en 2016.

Dans un entretien, l’ancien ambassadeur américain George Krol définit les priorités de l’administration Joe Biden en Asie centrale. Il ne s’attend pas à des changements radicaux, mais compte sur une plus grande attention à la région.

Novastan reprend et traduit ici un article publié le 15 mars 2021 par le média kazakh Vlast.

Les États-Unis ont apporté une contribution importante à l’édification des États indépendants d’Asie centrale, sûrement la plus conséquente de toutes les puissances sérieusement impliquées dans les affaires de la région. Plus de 30 ans après que les pays d’Asie centrale ont obtenu leur indépendance, les États-Unis, ainsi que la région elle-même, sont confrontés à de nouveaux défis. L’équipe de politique étrangère du président Joe Biden a commencé à spécifier son agenda. Quels sont la place et le rôle de l’Asie centrale dans celui-ci ?

Nargis Kassenova, la chef du programme sur l’Asie centrale du centre Davis pour les études russes et eurasiennes (Université d’Harvard), s’est entretenue avec l’ambassadeur George Krol, un vétéran de la politique étrangère américaine dans l’espace post-soviétique, qui a occupé des postes clés tels que secrétaire d’État américain adjoint chargé de l’Asie centrale (2008-2010), ambassadeur en Ouzbékistan (2011-2014) et ambassadeur au Kazakhstan (2015-2018).

Nargis Kassenova : L’administration Joe Biden est en train de former son équipe de politique étrangère et de formuler ses priorités. Que savons-nous, ou que pouvons-nous supposer, concernant la politique des États-Unis en Asie centrale ? Commençons avec le tableau général : les priorités de la politique étrangère des États-Unis telles que les a récemment décrites le secrétaire d’État Antony Blinken… Qu’est-ce qui est d’actualité pour l’Asie centrale ?

George Krol : Tout d’abord, comme c’était le cas pour les administrations américaines précédentes, je ne pense pas que l’administration Joe Biden fera de l’Asie centrale une de ses priorités essentielles en termes de politique étrangère, et je n’anticipe pas de changements radicaux dans la politique américaine actuelle dans la région. Le secrétaire d’État Antony Blinken a indiqué que les principaux efforts de la politique étrangère de l’administration Joe Biden consisteront à rétablir les partenariats de l’Amérique avec ses alliés, à faire face au défi que constitue la Chine en tant que concurrent principal des États-Unis et à lutter contre le réchauffement climatique. Ces deux derniers points pourraient avoir un rapport avec l’Asie centrale, où l’administration Joe Biden, contrairement à l’administration Barack Obama, pourrait être moins encline à accepter les actions de la Chine, telle que l’initiative de la Nouvelle route de la Soie, et pourrait potentiellement réduire son soutien au développement des ressources en hydrocarbures dans la région.

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Antony Blinken a également souligné que l’administration Biden placerait les droits de l’Homme et les valeurs au centre de sa politique étrangère, et s’efforcerait de la rendre plus pertinente et favorable pour la classe moyenne américaine et pour l’économie des États-Unis. Mais je ne pense pas que cela présage des changements majeurs dans les relations de l’Amérique avec l’Asie centrale : il y aura ainsi une poursuite, plutôt qu’une intensification, des efforts visant à encourager les pays d’Asie centrale à promouvoir l’État de droit, la démocratie et le respect des droits de l’Homme.

Que nous disent les nominations dans l’équipe de politique étrangère ?

Bien que le secrétaire d’État et son équipe dans le Département d’État, ainsi que le conseiller à la sécurité nationale Mark Sullivan et son équipe, soient plus expérimentés dans les relations avec les alliés européens, il semblerait que l’administration s’efforce d’attirer des diplomates de carrière et des individus avec une expertise régionale importante, afin d’aider à restaurer les partenariats et à relancer la diplomatie américaine traditionnelle dans différentes régions du monde, telles que le Moyen-Orient, l’Asie, etc. Je soupçonne que la personne qui deviendra secrétaire d’État adjoint pour l’Asie du Sud et centrale se concentrera davantage sur l’Asie du Sud que sur l’Asie centrale, tout comme ses prédécesseurs. Au sein du Conseil de sécurité nationale, la responsabilité pour les affaires d’Asie centrale n’est plus combinée avec les affaires d’Asie du Sud, mais est de nouveau rattachée aux affaires russes, comme c’était le cas sous l’administration Barack Obama. Cependant, je doute que cela change l’approche des États-Unis à l’égard de l’Asie centrale, qui est restée plus ou moins inchangée ces 30 dernières années.

Ambassadeur George Krol Kazakhstan
L’ambassadeur américain George Krol.

Cette politique suivra probablement en grande partie celle que le secrétaire d’État Antony Blinken avait exposée dans son intervention en mars 2015 à l’institution Brookings, lorsqu’il était encore Secrétaire d’État adjoint. Je soupçonne néanmoins que l’administration Joe Biden réexaminera les politiques dans toutes les régions du monde, y compris l’Asie centrale. Mais je doute que cet examen n’aboutisse à plus qu’un reconditionnement, une correction, ou une réorientation des politiques déjà établies concernant la région.

Dans quelle mesure pouvons-nous nous attendre à de la continuité ou à des changements dans les politiques, les approches et les outils ?

Contrairement à l’administration précédente, la nouvelle administration affirme qu’elle s’efforcera de résoudre les problèmes mondiaux par le biais de partenariats, plutôt qu’en agissant comme une superpuissance isolée. Je soupçonne que cela signifiera un retour à davantage de consultations avec les alliés, une recherche de partenaires, ainsi qu’une politique étrangère fondée sur des échanges diplomatiques traditionnels, plutôt que des communications par Twitter ou par téléphone, et des réunions sans préparation ou participation bureaucratique. Le président précédent ne faisait pas confiance à la bureaucratie professionnelle de la politique étrangère, et elle non plus ne lui faisait pas confiance. La politique revient maintenant à sa forme et son contenu traditionnels, et elle semblera probablement moins pompeuse et conflictuelle, à l’exception peut-être de ce qui concerne la Russie et la Chine.

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Il est important de noter que les politiciens dans l’administration Biden, notamment les diplomates de carrière, croient profondément en la supériorité, l’exclusivité et l’irremplaçabilité de l’Amérique et pensent que le reste du monde a besoin du leadership américain et le veut. Ils estiment que renoncer à la gouvernance serait irresponsable et néfaste envers les intérêts propres des États-Unis. Je ne suis pas certain que le reste du monde veuille un leadership américain, tel que les États-Unis l’ont implémenté dans le passé, avant même l’administration Donald Trump. Ils veulent un partenariat américain.

Avec un état d’esprit aussi enraciné concernant la supériorité des États-Unis, il sera intéressant de voir si l’administration Joe Biden fera preuve d’un vrai partenariat en pratique, et pas seulement dans les mots. Sera-t-elle prête à élaborer et à ajuster sa politique en se basant sur les conseils et les intérêts des partenaires, au lieu de prendre une approche maximaliste et intransigeante envers ses alliés, aussi bien que ses concurrents ? Il semble également que l’administration Joe Biden, comme les administrations précédentes, continuera de s’appuyer sur les sanctions en tant qu’outil politique clé, quelle que soit leur efficacité réelle, pour modifier le comportement des autres États et acteurs gouvernementaux. Les sanctions sont généralement politiquement opportunes, mais leur efficacité est discutable.

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En ce qui concerne la structure des relations officielles de l’administration Biden avec l’Asie centrale, je m’attendrais à ce que l’administration conserve le format des réunions ministérielles annuelles du C5+1. Néanmoins, je doute que nous voyions une expansion spectaculaire de l’engagement américain dans la région, que Washington continue probablement de considérer comme secondaire dans le cadre de ses propres intérêts, même s’il ne le dit pas publiquement.

Voyons-nous une quelconque reconfiguration au niveau de la place de l’Asie centrale dans cette image globale de la politique étrangère américaine ?

Comme je viens de l’indiquer, les politiciens américains considèrent généralement l’Asie comme une périphérie de la politique américaine, par rapport aux priorités telles que la stabilisation de l’Afghanistan et l’opposition aux efforts de la Russie, et maintenant aussi de la Chine, pour dominer leurs voisins, ou l’effort général pour promouvoir la démocratie, les droits de l’Homme et l’État de droit dans le monde entier. Je ne vois pas cette configuration changer de manière significative sous l’administration Joe Biden.

Depuis le moment où les pays d’Asie centrale ont acquis leur indépendance, les États-Unis se sont intéressés au développement et au renforcement des liens de la région avec l’Europe et la communauté euro-atlantique. Qu’en est-il ? À quoi faut-il s’attendre ?

Les précédentes administrations américaines ont tenté d’encourager et de créer une plus grande interconnexion, à la fois entre les États d’Asie centrale eux-mêmes et avec le monde extérieur, mais moins du côté de l’Europe et des États-Unis que vers l’Afghanistan et l’Asie du Sud, directement par la mer Caspienne. Il était également sous-entendu que les États d’Asie centrale devaient diversifier leurs liens afin d’accroître leur indépendance vis-à-vis de l’influence russe.

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Afin d’atteindre ce but, les États-Unis ont soutenu différents projets : Trade & investment framework agreements (TIFA), le gazoduc Turkménistan-Afghanistan-Pakistan-Inde (TAPI), Central Asia-South Asia project (CASA 1000), la Nouvelle route de la Soie et Central Asia regional economic cooperation (CAREC). Il y a eu quelques progrès et accords signés, mais honnêtement, aucun d’entre eux n’a été entièrement mis en œuvre. Je m’attends à ce que l’administration Joe Biden continue d’insister sur cette interdépendance et ces projets politiques avec ses partenaires, mais sûrement sans véritable soutien financier direct.

Les États d’Asie centrale soutiennent cette interdépendance dans la théorie, et il semblerait que l’Ouzbékistan s’efforce de mener ces efforts. Mais les pays eux-mêmes n’ont pas encore éliminé les principaux obstacles entre eux. L’apaisement des tensions entre les États-Unis et l’Iran pourrait accélérer la création d’une liaison entre l’Asie centrale et l’Iran, et via les ports iraniens, avec le reste du monde. Comme je l’ai mentionné précédemment, l’administration Joe Biden soutiendra probablement moins l’initiative des Nouvelles routes de la Soie de la Chine, et encouragera l’Asie centrale à diversifier ses liens, sans tomber sous la domination chinoise, soit une approche similaire à celle visant à réprimer la domination russe.

Vous avez attentivement observé comment la région d’Asie centrale s’est développée en trois décennies d’indépendance. À votre avis, comment peut-on comparer l’Asie centrale aux autres régions de l’ex-union soviétique ? Dans quels domaines a-t-elle pu développer son potentiel ?

Par rapport à la Russie, à l’Ukraine, à la Biélorussie et au Caucase, l’Asie centrale a moins évolué économiquement et politiquement au cours des 30 dernières années. D’un point de vue économique, la région dispose de ressources relativement abondantes et d’une population croissante. Mais en pratique, les élites au pouvoir ne se montrent pas particulièrement prêtes à changer leur politique de rente essentiellement protectionniste, ni à permettre aux entrepreneurs privés et aux marchés concurrentiels de prospérer. Le développement des petites et des moyennes entreprises présente un grand potentiel pour l’expansion de l’économie et des opportunités d’emploi, en particulier dans le domaine de l’agriculture, où il existerait éventuellement un marché important pour les produits d’Asie centrale en Chine, en Asie du Sud, dans les pays du Golfe, ainsi qu’en Russie et en Europe.

Mais le plus grand obstacle semble être la réticence du gouvernement à assouplir le contrôle oligarchique de l’économie, et à donner plus de liberté aux entrepreneurs et aux marchés pour travailler. Même au Kazakhstan, où les leaders déclarent leur engagement vis-à-vis des principes du marché, le contrôle gouvernemental sur les décisions économiques est encore trop important, ce qui reflète une empreinte persistante des pratiques et des mentalités économiques soviétiques. Il est possible que les États d’Asie centrale aient également moins changé que les autres ex-républiques soviétiques qui ont donné une plus grande marge de manœuvre, bien que limitée, au pluralisme, et accordé une liberté d’expression relativement plus importante au public.

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En Asie centrale, le Kazakhstan, le Kirghizstan et maintenant aussi l’Ouzbékistan donnent plus de place à la liberté d’expression, mais pas au point de remettre en cause les dirigeants et les structures gouvernementales déjà en place.

Compte tenu de votre expérience en tant qu’ambassadeur des États-Unis en Ouzbékistan et au Kazakhstan, les deux plus grandes républiques d’Asie centrale, que conseilleriez-vousafinde promouvoir au mieux l’interconnexion et le bien-être commun de la région ?

Il semble que l’Ouzbékistan et le Kazakhstan travaillent ensemble afin de développer une coopération et des liens plus étroits, tout d’abord entre eux, dans de nombreux domaines, tels que le commerce, le tourisme, les travailleurs migrants, et les efforts visant à éliminer les menaces communes à la sécurité. Je pense que la prochaine étape, avec le temps, consistera à étendre cette dynamique afin d’inclure d’autres États voisins d’Asie centrale.

Antony Blinken Secrétaire d'Etat
Le secrétaire d’État américain Antony Blinken.

Mais aucun État ne veut que ses voisins le dominent ou le contrôlent, bien qu’il puisse voir des avantages pour lui-même dans la réduction des barrières commerciales, le rétablissement du transport et d’autres connexions. J’hésite à utiliser le mot “intégration”, car chez de nombreux habitants d’Asie centrale, cette terminologie évoque une attitude négative vis-à-vis du passé soviétique de la région. Les États eux-mêmes diffèrent en termes de gestion, d’économie et de politique : il leur faudra du temps et de la patience afin d’instaurer une véritable coopération régionale. Des mesures telles que permettre aux citoyens de circuler plus librement à travers les frontières, ou encourager davantage de proximité entre les individus à travers toutes les gammes de la société, peuvent aider à établir des liens régionaux, et éventuellement des politiques communes.

Que pensez-vous du développement de différents couloirs reliant l’Asie centrale à d’autres régions ?

Jusqu’à présent, les couloirs de transport ont surtout permis le transit de marchandises, en provenance de pays tels que la Chine, à travers l’Asie centrale, vers des marchés extérieurs à l’Asie centrale. Les couloirs énergétiques acheminent les ressources en hydrocarbures depuis l’Asie centrale vers les marchés, tandis que l’énergie électrique produite dans la région atteint désormais des consommateurs en dehors de l’Asie centrale.

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Les pays de la région tentent de diversifier non seulement leurs couloirs commerciaux, mais également leurs économies, afin de produire plus de marchandises, plutôt que seulement des matières premières à exporter sur les marchés. La production agricole fraîche et diversifiée aurait potentiellement des marchés lucratifs dans la région du Golfe et en Chine, et pas seulement en Russie comme par le passé. La réduction des coûts et l’augmentation de la vitesse des transports seront des facteurs clés pour améliorer la compétitivité des économies et des produits sur le marché mondial, ainsi que pour accroître leur attrait auprès des investisseurs.

La politique étrangère des États-Unis possède un fort aspect normatif, et il semble que l’administration Joe Biden prend la démocratie et la promotion des droits de l’Homme au sérieux. Les résultats des États d’Asie centrale dans ce domaine ne sont pas particulièrement bons, mais ils ne suivent pas non plus entièrement l’exemple de leurs grands voisins autoritaires. Les habitants d’Asie centrale sont intéressés par de bonnes relations et une coopération avec l’Occident. Dans ces conditions, quel programme normatif est réalisable dans la région ?

Les États-Unis et les pays de l’Union européenne (UE) ont depuis longtemps fait des questions normatives, telles que le respect des droits de l’Homme, la construction d’institutions politiques plus démocratiques et l’État de droit impartial, des éléments clés de leur politique étrangère en Asie centrale, du moins en théorie. Comme je l’ai déjà fait remarquer, l’administration Joe Biden a déclaré que ces questions seraient au centre de la politique étrangère américaine. Les États d’Asie centrale eux-mêmes déclarent également partager ces valeurs et s’efforcent de les concrétiser. Mais comme nous le voyons même en Amérique, les valeurs normatives sont compliquées à mettre en œuvre. Il est tout aussi difficile de les mettre en pratique dans la politique étrangère, où elles entrent souvent en conflit avec d’autres intérêts pressants.

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La poursuite d’objectifs normatifs ambitieux a été une histoire longue, ambiguë et continue, pour toutes les sociétés, y compris aux États-Unis. Il n’y a pas de projet unique ou de chemin magique pour atteindre ces objectifs. Cela dépend en grande partie des dynamiques internes sociales, culturelles, politiques, économiques et personnelles de chaque société, et pas tellement des « experts » externes, bien que les influences extérieures aient aussi une importance. Cela s’applique à la fois aux pays d’Asie centrale et aux États-Unis.

Il est important de comprendre la dynamique complexe dans chaque pays. Les sociétés d’Asie centrale changent, mais il est difficile de dire comment ces changements affecteront les aspects normatifs. La promotion constante et patiente du respect des droits de l’Homme est importante, mais je pense qu’il est nécessaire de procéder à une révision minutieuse et réaliste des politiques et des outils généralement utilisés en dehors des États pour encourager des changements normatifs dans une autre société.

À votre avis, quelles opportunités et quels problèmes nécessitent une plus grande attention de la part des politiciens américains ?

Comme je l’ai indiqué dans mes réponses précédentes, le défi clé pour les politiciens américains est de reconsidérer, de voir sous un autre angle, et peut être de repenser le monde, et le rôle des États-Unis dans celui-ci. Cela nécessitera plus que des beautés rhétoriques et des discours retravaillés : il faudra aussi des décisions pratiques dures, basées sur des évaluations réalistes, les limites et le potentiel de la puissance et de l’influence américaine dans différentes régions du monde.

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Il sera difficile, et peut être impossible, de changer la façon de penser le système d’exploitation, la supériorité morale, militaire et politique, qui guide la majorité des diplomates américains et des politiciens en charge des affaires étrangères, d’autant plus qu’ils ont généralement peu de temps pour des réflexions et des ajustements aussi sérieux, alors qu’ils sont en train de réagir aux crises et aux problèmes mondiaux. Mais c’est maintenant le moment où jamais pour commencer, lors des sessions d’élaboration des politiques, à soulever plus souvent les questions critiques et être honnête quant aux priorités, aux opportunités et aux conséquences. Je dois reconnaître qu’après 36 ans de carrière de diplomate, j’ai beaucoup plus de questions que de réponses.

Propos recueillis par Nargis Kassenova pour Vlast

Traduit du russe par Madeleine Le Page

Édité par Paulinon Vanackère

Relu par Emma Jerome

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