En réalisant le documentaire « Gérard Depardieu : mon rêve ouzbek », Arnaud Frilley dévoile un Ouzbékistan fascinant par la beauté de ses paysages et sa richesse culturelle. Novastan s’est plus particulièrement intéressé au rôle joué par les Ouzbeks dans la réalisation de ce documentaire.
Dans le cadre du Festival des cinémas d’Asie (FICA) qui s’est tenu à Vesoul du 1er au 8 février dernier, Arnaud Frilley, réalisateur du documentaire « Gérard Depardieu : mon rêve ouzbek », a pu présenter son film au grand public. Le film a été diffusé sur Paris Première en octobre 2020, sans diffusion cinéma.
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Originalement prévu en collaboration avec le réalisateur ouzbek Ali Khamraïev, le documentaire a finalement dû être pensé différemment. « Ça s’est très mal passé entre Khamraïev et Depardieu, dès le premier jour. Ali voulait faire du cinéma alors que nous voulions faire un documentaire. En plus de ça, il fantasmait un film avec Depardieu de la Nouvelle Vague, mais Gérard n’avait pas envie de tourner comme il y a 40 ans », explique Arnaud Frilley à Novastan.
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Sans la possibilité d’utiliser le script de Ali Khamraïev, Arnaud Frilley a repensé le scénario et a choisi de laisser plus de place à la spontanéité. Le réalisateur a souhaité montrer à l’audience une belle histoire, suivant le périple de Gérard Depardieu à travers l’Ouzbékistan. Le film emmène le spectateur dans les principaux points touristiques du pays : Khiva, Samarcande, Boukhara, connues pour leur passé de routes de la Soie, tout en mettant en lumière des moments plus difficiles comme à Moynaq, située à côté de ce qui reste de la mer d’Aral.
Des facettes nuancées
Tout au long du film, Gérard Depardieu part à la rencontre de la population ouzbèke, sa culture, ses coutumes, sa religion, et les empreintes laissées par ses précédentes civilisations. Accompagné par des guides locaux, il voyage de ville en ville, faisant découvrir au spectateur l’histoire peu connue de ce pays. Ce documentaire met en avant les atouts touristiques du pays en y dévoilant ses multiples facettes : sa richesse culturelle, ses villes mythiques et vestiges historiques, la diversité de ses paysages.
Bien que certains puissent y voir un film de promotion touristique, pour Arnaud Frilley, cette richesse « est une réalité. Pourquoi ne pas la montrer ? Combien de temps ça va durer ? Combien de temps va-t-on garder cet équilibre extrêmement fragile ? ». Le réalisateur fait référence aux multiples couches de civilisations qu’abrite l’Ouzbékistan et à son islam soufi, très philosophique, utilisé par le pouvoir pour porter un nouveau modèle politique. Arnaud Frilley questionne, « à combien de personnes cet islam soufi parle-t-il réellement ? Aujourd’hui, un islam beaucoup plus traditionnel dont on connaît les conséquences, parle peut-être à beaucoup plus de personnes, moins éclairées, moins éduquées ».
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L’indépendance du pays a été marquée par la recherche d’une alternative spirituelle à l’idéologie soviétique. Dans ce contexte, le soufisme a été déclaré « patrimoine exceptionnel », les dirigeants politiques ont souhaité trouver une alternative à l’agressivité et au terrorisme vers lesquels semblait se porter l’islam politique. Le président ouzbek Chavkat Mirzioïev a d’ailleurs entrepris dès son arrivée au pouvoir en 2016 des changements importants à travers la construction d’un nouveau modèle de société, le « nouvel » Ouzbékistan. Cette stratégie de développement comprend diverses directions telles que des réformes dans le domaine spirituel et éducatif afin de favoriser une société plus éclairée.
Un tournage réalisé sans accroc
A travers ce film, le spectateur peut estimer que les partenaires ouzbeks ont saisi l’opportunité de porter et défendre un certain modèle politique, basé notamment sur l’islam soufi. Pour Arnaud Frilley, l’Ouzbékistan n’a pas cette volonté de dépasser les frontières de la région avec ce modèle de gouvernance. « Les Ouzbeks veulent faire renaître une histoire glorieuse. Ils ont eu des astronautes, des mathématiciens, une certaine renommée dans la médecine, la poésie, un passé extrêmement riche. Ce qu’ils veulent, c’est utiliser cette richesse », décrit le réalisateur.
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Arnaud Frilley explique à Novastan que la coopération entre les partenaires ouzbeks et l’équipe française a été très fluide, « il n’y a eu aucune directive donnée ». Le réalisateur ajoute que l’un de ses collaborateurs ouzbeks l’a questionné sur certaines scènes, pouvant peut-être choquer l’audience française. Bien que n’étant pas de cet avis, Arnaud Frilley a cependant accepté de couper la scène du combat de coqs. En revanche, il a choisi de garder la scène avec les chevaux qu’il pensait importante à ses yeux.
Plus largement, la volonté d’ouverture du président ouzbek, réélu en octobre 2021, se ressent partout, décrit le réalisateur français. Arnaud Frilley donne notamment l’exemple de la scène de la grande prière qui a pu être filmée, ou encore de tous les plans de drone qui ont été possibles alors que dans de nombreux pays cela peut être parfois plus compliqué. « On ne nous a jamais interdit quoi que ce soit. Nous étions accompagnés par une personne qui nous servait d’interprète et nous avions des guides de différentes nationalités : tadjike, arabe, ouzbèke… Tout a très bien fonctionné », précise Arnaud Frilley.
De nouveaux projets sur l’Asie centrale
Au-delà de Gérard Depardieu, le réalisateur français a plusieurs projets à venir avec l’Asie centrale. Arnaud Frilley prévoit ainsi de sortir un film sur la mer d’Aral afin de mettre en lumière ce qui est engagé aujourd’hui pour combattre les conséquences écologiques toujours dramatiques. A travers un court documentaire, il souhaite montrer les initiatives prises côté kazakh et ouzbek, à l’instar de la plantation de milliers d’arbres permettant d’éviter que le vent n’emporte le sel et abîme toute la région. « Ce n’est tout de même pas facile de tourner, la population est tellement jeune, il faut venir avec une équipe pour avoir du savoir-faire », nuance cependant Arnaud Frilley auprès de Novastan.
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Le réalisateur espère également réaliser un film avec le Kazakhstan. « J’aime bien ce pays qui est fascinant par son immensité, son silence dans les steppes, et le côté attachant des Kazakhs. Ce sera plutôt un film auteur sur le son, le chamanisme… Je suis bien avancé mais je n’aime jamais parler des choses avant qu’elles ne soient lancées », conclut le réalisateur français.
Coline Boucault Responsable marketing de Novastan
Relu par Emma Jerome
Catherine Verger, 2022-03-14
Et où peut- on voir ce documentaire désormais ?
Reply
Etienne Combier, 2022-03-14
Bonjour Catherine, vous pouvez le retrouver sur Molotov.tv en VOD normalement :
https://www.molotov.tv/fr_fr/p/235658-21/gerard-depardieu–mon-reve-ouzbek
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