De plus en plus de touristes visitent le Tadjikistan chaque année. Pourtant, ils sont encore très peu nombreux à venir en hiver. La faute à des installations encore peu développées, malgré un vrai potentiel.
Novastan reprend et traduit un article initialement publié sur le site tadjik Asia-Plus.
Les touristes étrangers qui se rendent au Tadjikistan savent que l’on peut aujourd’hui trouver un lieu où passer d’agréables vacances, notamment dans le massif du Pamir. Mais pour venir y pratiquer des sports d’hiver, le pays n’est pas le premier auquel on pense.
Il existe pourtant une station de ski nouvellement rénovée. Il s’agit de la station de ski Safed-Dara, située dans l’est du pays. Située à plus de 2 100 mètres d’altitudes, ce vestige soviétique permet de faire du ski, du patin à glace à ciel ouvert, de se délecter de la vue depuis les pistes ou encore de profiter de la nature hivernale.
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En revanche, il n’existe pas de chemin sécurisé ouvert pour les touristes à travers les montagnes du Tadjikistan. D’après un représentant de l’agence de voyage Follow Tajikistan, les circuits hivernaux n’en sont encore qu’à un stade d’élaboration. « En étudiant la situation du tourisme hivernal, nous avons mis en évidence que les désireux d’admirer la nature unique du Tadjikistan à cette époque en particulier sont nombreux », explique-t-il à Asia Plus.
Pas encore de randonnées organisées
Mais pour le moment, les agences de tourisme ne se pressent pas pour réunir des groupes. Cela est dû au manque de préparation des voyageurs. « Nous nous occupons actuellement de renforcer nos bases matérielles et techniques, nous avons acheté quelques tentes, un véhicule tout-terrain. Nous allons étudier les lieux, nous préparons les circuits, ensuite nous pourrons inviter des participants à la randonnée », précise le voyagiste.
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Le Tadjikistan compte un club d’alpiniste. Son président, « Agba » Anatoly Charipov, précise qu’il développe surtout du tourisme sportif, et les candidats commencent en général par apprendre en salle d’escalade. Seuls les voyageurs préparés, qui mènent un train de vie sportif, sont autorisés à se joindre aux expéditions.
« Pour ceux qui viennent pour la première fois à la montagne l’hiver, mieux vaut commencer par Safed-Dara. Parce que là-bas ce n’est pas dangereux, toutes les conditions de sécurité sont réunies. À cause du temps, réaliser un voyage dans les montagnes du Tadjikistan en hiver est impensable, » estime Anatoly Charipov.
Les habitants savent profiter de leurs montagnes
Que ce soit en été ou en hiver, les Tadjiks aiment se rendre à la montagne. Cela n’intéresse pas les villageois. Regarder les montagnes leur suffit.
Nigora, habitante de Douchanbé, la capitale tadjike, est adepte d’expéditions en montagne depuis 7 ans. Elle a depuis ce temps amassé une longue expérience. « Nous réunissons des groupes. Nous avons notre équipe, la dernière fois nous étions 50 personnes. La semaine dernière nous nous sommes de nouveau réunis, mais nous avons dû reporter l’expédition en raison du mauvais temps. », décrit-elle.
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Mais ces randonnées en montagne demande un certain sens de l’organisation, raconte Nigora. « En général, nous allons à Varzob (au nord de Douchanbé, ndlr) parce que c’est proche. On peut rentrer le soir chez soi. Les garçons peuvent rester la nuit, mais les filles ne préfèrent pas. A Romit (à l’est de Douchanbé), Nourek (au sud-est de Douchanbé) et dans d’autres lieux, à cette époque il fait très froid et c’est loin. En un jour, on ne peut pas faire l’aller-retour ».
Les touristes hivernaux sont jeunes
Une autre particularité des voyageurs d’hiver : l’âge. Selon Nigora, ceux qui vont en montagne sont jeunes, sportifs, alors que les plus vieux se méfient de l’hiver. « Le meilleur moment est en décembre et février, en janvier en général il fait froid, il peut y avoir des chutes de neige et des avalanches. Nous suivons les communiqués du centre hydro-météorologique et du ministère des Situations d’Urgence, » explique Nigora d’après son expérience.
Cependant, les groupes constitués de professionnels, de grimpeurs, d’alpinistes, de sportifs s’adonnant au tourisme de montagne emmènent rarement des débutants avec eux.
Pour ceux qui oseraient quand même passer des vacances dans les montagnes sans préparation sportive, Nigora recommande les lieux les plus proches des villages. « Avant une expédition il est indispensable de prévenir des proches et des connaissances, en aucun cas il faut se rendre seul en montagne. Par temps d’hiver, plus le groupe est grand et mieux c’est », recommande l’habitante.
L’effet thérapeutique de la montagne
Originaire de Shakhrinav, dans le sud du Tadjikistan, Abdoukarim Kholov est un amateur de randonnées en montagne. Sa principale motivation n’est pas la beauté du paysage mais plutôt l’amélioration de sa santé. « En été c’est beaucoup plus simple, mais en hiver il y a ces trois mois problématiques, » dit-il.
Abdoukarim Kholov ne peut pas se permettre d’acheter des équipements coûteux, il n’a pas de tente ni de sac de couchage. Lorsqu’il se lance dans une expédition à la gorge de Karatag, il dort chez des connaissances qui habitent dans les kichlaks, des villages de montagne en Asie centrale.
« J’ai 56 ans », précise Abdoukarim Kholov. « Il m’est difficile de trouver des compagnons. Dans notre région, seules quelques personnes isolées s’intéressent aux voyages de montagne. Et même lorsqu’on trouve un complice, il est souvent empêché par ses problèmes domestiques. »
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Il est dangereux de voyager seul en montagne. En témoigne l’histoire de Saïd Djonmirzoiev, qui a tenté durant l’hiver 2007 de faire la traversée à pied de Khodjent à Shakhrinav en passant par les crêtes de Turkestan, Zarafchanski et Gissarski. Au cours de la randonnée à travers le passage d’Angicht, il est tombé dans une cavité et par miracle a survécu. Il a réussi à se sortir hors de la profonde grotte avant de parvenir à rejoindre le village le plus proche, où lui ont été administrés les premiers secours.
Pour cette raison, demandez-vous toujours avant une randonnée dans les montagnes si vous êtes prêts physiquement et mentalement pour le voyage. Sinon, l’extrême n’est pas pour vous. Achetez-vous plutôt des billets pour Safed-Dara et montez au sommet des pistes, faites du ski, passez du bon temps et rentrez chez vous en bonne santé.
Saïfiddin Karaïev, journaliste pour Asia-Plus
Traduit du russe par Juliette Chevée
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