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« La marche de l’Histoire » : le Tadjikistan vu par Romain Arazm

Un court documentaire français sur le Tadjikistan est sorti sur YouTube. Novastan en propose une critique.

Rédigé par :

Paulinon Vanackère 

Tadjikistan Montagnes
Le réalisateur a tourné un documentaire poétique au Tadjikistan. Photo : Romain Arazm.

Un court documentaire français sur le Tadjikistan est sorti sur YouTube. Novastan en propose une critique.

Faire le portrait d’un pays, de ses complexités et de ses contradictions, de sa beauté et de sa poésie, en un peu moins d’une heure. C’est ce qu’a entrepris l’écrivain et réalisateur Romain Arazm, à l’aide d’un texte soigné et d’images glanées. Après le Kirghizstan en 2021, il s’est rendu au Tadjikistan.

Tadjikistan, la marche de l’Histoire entreprend un voyage autant géographique qu’historique, politique et culturel. Il part de Khoudjand, dans le Nord du pays, pour se rendre à la capitale Douchanbé, avant de dériver vers le massif du Pamir et la frontière avec le Kirghizstan.

Le documentaire, tourné fin 2024, est désormais disponible sur YouTube.

Un point de vue personnel

La scène d’ouverture semble donner le ton : image omniprésente du président, régime dictatorial, musique orientalisante à l’origine indéterminée.

Mais très vite, le film s’éloigne des écueils habituels des documentaires sur la région. La voix off, qui semblait martiale, est en fait au service d’un texte poétique qui partage des idées parfois personnelles. Et la dictature, s’il fallait en parler parce qu’elle est bien là, définit moins le pays que les habitants rencontrés tout au long du récit.

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Le réalisateur confie d’ailleurs à Novastan que le tournage n’a pas rencontré d’embûches particulières au Tadjikistan.

« Le seul problème que j’ai rencontré a eu lieu sur les rives du Panj le long de la frontière afghane. Des militaires tadjiks m’ont demandé de les suivre dans une base pour que leur chef regarde un à un mes rushs sur la caméra. Il n’a supprimé que trois vidéos parce que dans le paysage que j’avais filmé, il y avait des infrastructures de défense que je n’avais même pas vues en les filmant. J’ai bien sûr compris leur démarche. L’ambiance n’était pas mauvaise », se souvient-il.

Des déconvenues à la frontière

En revanche, la situation à la frontière kirghize n’étant pas encore claire au moment du tournage, le réalisateur a eu des difficultés pour entrer au Kirghizstan – juste après la scène finale du film – car il lui manquait un « document spécial ». Il a ainsi été retenu le temps d’éclaircir la situation, à 4 200 mètres d’altitude.

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« J’ai donc passé trois jours dans une cellule en sous-sol, heureusement chauffée car il faisait moins 25 dehors. J’ai tout de même sympathisé avec certains jeunes gardes-frontières curieux de la France et de son mode de vie. Un chien m’a également tenu compagnie. J’en ai profité pour lire et écrire mais le temps m’a paru long », raconte-t-il.

Des portraits d’artistes

Mais loin des représentations consensuelles de terra incognita pour touristes aventureux, Romain Arazm montre des scènes de la vie de tous les jours, que ce soit dans le centre en mutation de la capitale ou au marché d’une petite ville. Et partout où elle se place, la caméra installe le narrateur, autant que le spectateur, d’égal à égal avec les habitants.

Le réalisateur dépasse la représentation de la dictature en allant à la rencontre d’artistes contemporains qui s’inscrivent dans des traditions millénaires, ou qui à l’inverse se rapprochent de l’art occidental.

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« Parce que l’art est central dans ma trajectoire d’auteur et de réalisateur, je voulais absolument intégrer des artistes dans le film. Il fallait non seulement que leurs œuvres me touchent d’un point de vue esthétique mais aussi qu’elles racontent quelque chose de l’histoire du pays. C’est le cas de chacun des quatre », explique-t-il.

Des impressions de voyage

Le voyage s’accompagne de quelques écarts historiques assortis de charmantes images d’archive. Bien qu’il soit difficile d’expliquer avec objectivité des épisodes historiques aussi intriqués en un laps de temps si court, ce qui donne lieu à quelques raccourcis, le film donne une vue d’ensemble pertinente pour un spectateur néophyte.

Et si la moindre des choses serait de prononcer correctement les noms des villes et des artistes rencontrés – ce qui n’est en l’occurence pas toujours le cas – force est de constater que le fond a été méticuleusement documenté et que l’équipe est bien au fait des dernières évolutions, notamment sociales.

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S’il veut instruire sur les aspects les plus divers du pays, le film livre avant tout des impressions de voyage conscientes des enjeux profonds des sociétés traversées. Et dénote une fascination pour tout ce qui l’entoure.

Romain Arazm conclue ainsi auprès de Novastan : « Sans trop savoir pourquoi, l’Asie centrale m’attire comme un aimant. C’est un carrefour tellement riche, un mille-feuille culturel. Pour moi, le Tadjikistan est un Ithaque alors que je n’y avais jamais mis les pieds avant. Par ailleurs, je suis un peu obsessionnel sur les montagnes. Celles du Pamir m’ont laissé sans voix. Dans ces contrées, la notion d’espace prend une dimension totalement inouïe. »

Paulinon Vanackère
Rédactrice pour Novastan

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