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Affaire Doc-1 Max : les parents des enfants qui ont survécu peinent à financer le traitement

En 2022, les produits pharmaceutiques Doc-1 Max et Ambronol empoisonnent plus de 80 enfants en Ouzbékistan. Parmi eux, 68 ont perdu la vie après avoir reçu le traitement. Les autres ont survécu avec un handicap qui nécessite un traitement coûteux. Deux ans plus tard, alors que la justice a promis une indemnisation suffisante, les parents des enfants infirmes continuent de s’endetter pour financer les soins.

Rédigé par :

Marianne BULTEL 

hopital maladie
En Ouzbékistan, des dizaines d'enfants ont été empoisonnés à cause d'un médicament mal distribué (illustration). Photo : Gazeta.uz.

En 2022, les produits pharmaceutiques Doc-1 Max et Ambronol empoisonnent plus de 80 enfants en Ouzbékistan. Parmi eux, 68 ont perdu la vie après avoir reçu le traitement. Les autres ont survécu avec un handicap qui nécessite un traitement coûteux. Deux ans plus tard, alors que la justice a promis une indemnisation suffisante, les parents des enfants infirmes continuent de s’endetter pour financer les soins.

En janvier dernier, lors d’une audience judiciaire sur l’affaire, le procureur de l’État ouzbek a déclaré que 68 enfants avaient été les victimes mortelles des médicaments Doc-1 Max et Ambronol, écrit le média ouzbek Kun.

Le média ouzbek Gazeta rapporte qu’au moins 18 autres enfants se trouvent dans une situation de handicap après la prise du médicament, ce qui a obligé les parents à contracter des prêts pour soutenir leur traitement. Bien que le tribunal ait condamné les responsables à indemniser les familles des victimes jusqu’à un milliard de soums (71 442 euro), la distribution de cet argent se fait attendre.

En décembre 2022, le service de presse du ministère de la Santé a signalé l’apparition d’effets secondaires chez des enfants à la suite de la prise des médicament Doc-1 Max et Ambronol. Ces traitements ont été donnés aux patients sans prescription médicale et ont été majoritairement recommandés comme remèdes contre le rhume.

Enregistrés en 2012 et mis en vente la même année en Ouzbékistan, les comprimés et les sirops Doc-1 Max et Ambronol ont été fabriqués par Marion Biotech, dont le siège est basé à Noida, en Inde. Les produits ont été exporté par la société ouzbèke Quramax Medikal.

Une affaire qui voit le jour en 2022

Gazeta rapporte qu’en décembre 2022, une lettre du directeur du Centre médical des enfants de Samarcande, Davronbek Joumaniyozov, apparaît sur les réseaux sociaux avant d’être authentifiée par le ministère de la Santé. La lettre indique que la prise de Doc-1 Max a des effets secondaires néfastes et que le médicament serait responsable de nombreuses complications.

Jusqu’alors, le médicament était délivré sans ordonnance pour soigner des rhumes, dans certain cas avec la recommandation des pharmaciens. À tort, comme l’affirme le ministère de la Santé, puisqu’il s’agit d’un médicament composé principalement de paracétamol et que ce dernier ne doit être utilisé qu’à une température corporelle de 38 à 38,5°C, et dans des quantités moindres que celles indiquées.

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De plus, les études effectuées ont montré que le médicament comportait de l’éthylène glycol, une substance toxique qui, selon le dosage, peut entraîner « des vomissements, des évanouissements, des convulsions, des problèmes du système cardiovasculaire et une insuffisance rénale aiguë ».

En janvier 2023, le Service de la sécurité de l’État affirme que les médicaments Doc-1 Max et Ambronol n’ont pas été soumis à des analyses de laboratoire comme ils l’auraient dû.

Le tribunal promet des indemnisations conséquentes 

Les principaux accusés du procès, qui a débuté en août 2023, sont Singh Ragvendra Pratar, l’ancien directeur de Quramax Medikal, la responsable de l’enregistrement des médicaments Nouria Mirzakhmedova, l’ancien directeur du Centre d’État pour l’expertise et la normalisation des médicaments Sardor Karïev et son adjoint Amirkhon Azimov.

Lors d’une audience tenue le 26 février dernier, le tribunal pénal de la ville de Tachkent leur a ordonné de verser 75,6 milliards de soums (5,4 millions d’euros), soit un milliard de soums pour chaque famille des 68 enfants morts et pour les enfants gravement handicapés, 500 millions de soums (35 738 euros) pour les enfants avec un état de santé satisfaisant et 200 millions de soums (14 297 euros) pour les enfants touchés qui se sont rétablis.

Cependant, six mois plus tard, les parents de certaines victimes qui ont survécu à l’empoisonnement mais dont l’état de santé nécessite un traitement onéreux ont confié à Gazeta avoir peur de ne jamais recevoir la totalité de l’argent.

Des enfants dans le besoin d’un traitement onéreux

18 enfants sont encore dans une situation de handicap après avoir été empoisonnés par le Doc-1 Max. Au début du mois d’octobre, Gazeta s’est entretenu avec des « parents déséspérés » qui peinent à financer les traitements nécessaires aux maladies qu’ont contracté leurs enfants.

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Le père de l’une des victimes, Farkhodjon Rakhmonov, a confié que son fils, âgé de 3 ans, a perdu la vue et l’audition après avoir passé plus d’une année dans le coma. Il est tombé malade d’un rhume en décembre 2022 et sur les recommandations d’un pharmacien, son père a essayé de le soigner avec le sirop Ambronol. Peu de temps après, alors qu’il commence à souffrir d’une insuffisance rénale aiguë, il est conduit à Tachkent pour être placé en soins intensifs.

Farkhodjon Rakhmonov a raconté avoir dû se déplacer pour les soins en Inde, puis en Turquie, et qu’à Tachkent un traitement coûte entre 15 et 20 millions de soum (1 075 et 1 433 euro). Il affirme qu’en août, il n’a reçu que 33 millions de soums (2 365 euros) d’indemnités sur les un milliard de soums annoncés lors du procès. Il a confié à Gazeta avoir contracté un prêt de 300 millions de soums (21 503 euros) pour subvenir aux soins de son enfant.

Marianne Bultel
Rédactrice pour Novastan

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