Au grand dam des écologistes, le Tadjikistan prévoit d’augmenter de manière significative sa production de charbon pour porter le volume annuel extrait à 15 millions de tonnes.
Novastan reprend et traduit ici un article publié le 30 septembre 2019 par le média tadjik Asia-Plus.
Le Tadjikistan veut passer la seconde avec le charbon et augmenter drastiquement sa production. De fait, c’est ce qu’indique le plan national de développement de l’industrie du charbon pour l’horizon 2040, approuvé par le gouvernement. « Afin de s’assurer d’atteindre les objectifs de la stratégie de développement du pays, la production de charbon va être augmentée 7,6 fois, soit 10,4 millions de tonnes, d’ici 2030 puis, selon les prévisions, de 11 fois, soit 15 millions de tonnes, d’ici 2040 », détaille le document. Ses auteurs soulignent l’importance essentielle de l’industrie du charbon dans le secteur de l’énergie du Tadjikistan.
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L’amélioration de la méthode d’extraction à ciel ouvert et la transition progressive vers une extraction souterraine, de même que la modernisation des infrastructures et des techniques, l’apport d’investissements, la prospection et la création de nouvelles entreprises, devraient notamment permettre de développer le secteur.
21 gisements aujourd’hui
Actuellement, la petite République centrasiatique compte 21 gisements de charbon, représentant 3,6 milliards de tonnes. La production annuelle tadjike s’élevait en 2018 à un peu plus de 1,9 million de tonnes.
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D’après le plan, la production annuelle de charbon au Tadjikistan durant la période soviétique atteignait environ un million de tonnes, pour une demande annuelle de 1,5 million de tonnes. Durant les 11 premières années d’indépendance, seules les mines de Fon-Yagnob et Chourab étaient fonctionnelles, leur production totale moyenne plafonnant à 20 600 tonnes par an.
La réfection des mines de Fon-Yagnob, Chourab, Ziddi, Nazar-Aïlok, Saïed et Mionadou a permis de porter la production à un million de tonnes en 2015. Le nombre d’entreprises liées au charbon est passé de deux à 18, la majorité profitant de plus de 50 millions de dollars d’investissements nationaux et étrangers. De 2000 à 2018, la production a été multipliée par 93 pour atteindre 1,9 million de tonnes, un record national. Quatre entreprises publiques et six sociétés privées exploitent aujourd’hui huit mines de charbon à ciel ouvert et en galeries souterraines.
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La capacité de ces gisements est estimée à 2,6 millions de tonnes. Actuellement, l’extraction à ciel ouvert représente 70 % de la production, l’extraction souterraine le reste. « Outre l’extraction pure, les entreprises du secteur mènent des travaux de prospection, transforment les ressources impropres à l’industrie en production industrielle et utilisent les informations récoltées pour optimiser leurs activités », indique le plan.
Selon les dernières données fournies par le ministère de l’Industrie, les principaux consommateurs de charbon sont la centrale thermique de Douchanbé (60 % de la production), les industries (32,1 %), les citoyens (6 %) et les institutions publiques (1 %). Seul 0,9 % est destiné à l’exportation.
Les écologistes décrient une solution à court terme
Face à ce plan, les militants écologistes tadjiks appellent quant à eux les autorités du pays à ne pas privilégier la solution à court terme du charbon. « Le gouvernement du Tadjikistan souhaite augmenter à partir de 2020 la production de charbon afin non seulement de répondre à la demande nationale, mais également d’en exporter. Ceci implique une hausse significative de la production », ont déclaré avant la signature du plan des organisations écologistes locales dans un communiqué commun. Les ONG tadjikes luttant contre le changement climatique affirment que « le charbon est le combustible fossile le plus sale et la source d’énergie la plus dangereuse pour l’environnement ».
« À grande échelle, sa combustion est la plus grande source d’émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère », ajoutent-elles. Les ONG notent que si l’extraction du minerai est assez peu onéreuse au Tadjikistan, sa qualité est médiocre, ce qui accroît les effets nocifs sur l’environnement.
Pour les organisations écologistes, le pays subit déjà de plein fouet le changement climatique. Il a donc tout intérêt à se fixer des objectifs plus stricts de réduction de gaz à effet de serre, mais aussi de mettre tout en œuvre pour lutter contre ce changement climatique. Le principal conseiller de l’organisation écologiste Malenkaïa Zimlia (« Petite Terre »), Timour Idrissov, estime que la hausse de la production de charbon va ralentir la transition vers une économie verte. « Cette décision va lier le pays au charbon pour les trente ou quarante prochaines années. Des fonds qui pourraient être alloués à des projets d’optimisation énergétique ou au développement de sources d’énergies alternatives vont l’être à l’exploitation d’un minerai sale », conclut-il.
Païrav Tchorchambiev
Journaliste pour Asia-Plus
Traduit du russe par Pierre-François Hubert
Edité par Anthony Vial
Corrigé par Aline Simonneau
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