Astana remplacera-t-elle Minsk pour organiser les pourparlers de paix en Ukraine ? C’est ce qu’a laissé entendre le Président kazakh, Noursoultan Nazarbaïev, lors de sa rencontre au sommet avec son homologue américain, Donald Trump. Plusieurs politologues se sont penchés sur la possibilité d’une telle évolution dans des négociations débutées suite aux tensions dans l’est de l’Ukraine en 2014.
Novastan reprend et traduit un article initialement paru sur Tengrinews.
Accueilli à la Maison blanche par Donald Trump le 16 janvier dernier, le leader kazakh, Noursoultan Nazarbaïev, après avoir signé de nombreux contrats, a proposé que les négociations multilatérales sur la situation en Ukraine qui se tiennent pour le moment à Minsk, la capitale de la Biélorussie, aient lieu dans un autre pays.
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Information passée quelque peu inaperçue au départ, cette déclaration du Président kazakh a suscité l’attention de plusieurs experts internationaux qui y ont vu la volonté de Noursoultan Nazarbaïev d’accueillir lesdites négociations à Astana, la capitale du Kazakhstan.
Une bonne capacité de médiation
C’est notamment le point de vue du politologue Marat Bachimov qui voit d’un bon œil le déplacement du lieu des discussions vers la capitale kazakhe : « Il s’agit là d’un compromis acceptable. Et je pense que tous les pays concernés répondraient favorablement à une telle initiative. Il ne s’agirait pas de remplacer Minsk, mais d’ajouter un nouveau lieu de neutralité pour la bonne tenue des négociations à propos de l’Ukraine. Les accords de Minsk ne seraient aucunement remis en cause. »
« Le Kazakhstan a déjà démontré sa capacité à accueillir de tels échanges, comme ce fut le cas pour la Syrie. À cette occasion, Astana avait prouvé qu’elle était en mesure d’être un bon médiateur à l’international », a rappelé l’expert.
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Une question secondaire
Autre expert kazakh, Daniyar Achimbaïev soutient que le lieu des discussions n’a pas une importance fondamentale. C’est la façon dont les négociations sont menées qui importe le plus : « Il est nécessaire d’entretenir des contacts réguliers pour aller vers une résolution du conflit. Le cas de l’Ukraine est complexe et ne comporte pas que des aspects militaires. Les facteurs sont à la fois géopolitiques, politiques et économiques. L’obtention d’un cessez-le-feu a été une avancée, mais ce n’est guère suffisant. »
Ainsi, un règlement pacifique et durable de la situation dans le Donbass ukrainien sera difficile à obtenir en toutes circonstances. Et un changement de cadre des négociations demeure une question tout à fait secondaire pour le politologue kazakh.
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Almas Tchoukine, politologue, voit dans cette proposition des Présidents américain et kazakh l’aveu de l’échec du processus de Minsk : « Tout le monde a bien compris que les accords de Minsk sont désormais obsolètes. Le principal sujet à traiter réside dans les tensions actuelles entre la Russie et les États-Unis : elles doivent absolument être résolues. Des discussions doivent avoir lieu, que ce soit à Astana ou ailleurs. Il est possible qu’une médiation menée par le Président kazakh puissent susciter la confiance de toutes les parties engagées dans le conflit. Sans cette confiance, les négociations ne mèneront nulle part. »
Un simple effet de communication ?
Pour l’expert kazakh Aidos Sarym, le transfert des discussions sur la situation ukrainienne vers Astana n’est qu’un coup de communication de la part des autorités kazakhes : « L’objectif est de montrer que le Kazakhstan est un pays qui compte à l’international et qu’il est partie prenante des grands enjeux mondiaux. Mais je doute que la situation en Ukraine puisse être ainsi résolue dans sa globalité. Des accords partiels comme sur la délimitation des frontières ou la libération des prisonniers constitueront déjà d’importants pas en avant. »
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Les accords de Minsk sur la résolution du conflit en Ukraine ont été signés en 2014 et 2015 et ont permis une désescalade du conflit et un accord de cessez-le-feu après les combats qui ont ravagé l’est de l’Ukraine en 2014 et depuis. Les accords en question avaient à l’époque été signés par l’Ukraine, la Russie et les représentants des Républiques autoproclamées du Donbass. Le processus de Minsk sur la résolution du conflit qui s’en est suivi a aujourd’hui du plomb dans l’aile. La question de savoir si la tenue de nouvelles discussions à Astana permettra de relancer les pourparlers de paix reste ouverte.
Jérémy Lonjon
Rédacteur en chef de Novastan
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