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Comment l’Ouzbékistan cherche à soutenir ses femmes

L'Ouzbékistan a mis en place une ambitieuse stratégie de soutien aux femmes. Hook détaille ce à quoi elles ont désormais droit.

Rédigé par :

La rédaction 

Edité par : Paulinon Vanackère

Traduit par : aabdullaev

Hook

Ouzbékistan Femmes
Un programme de soutien aux femmes a été lancé en Ouzbékistan (illustration). Collage : Hook.

L’Ouzbékistan a mis en place une ambitieuse stratégie de soutien aux femmes. Hook détaille ce à quoi elles ont désormais droit.

Dans le programme national visant à accroitre les activités des femmes dans toutes les sphères de la vie économique, politique et sociale du pays pour 2022-2026, un plan global pour les soutenir de tous côtés est prévu. Par exemple, il est prévu de renforcer le système de construction de nouvelles infrastructures en lien avec le soutien aux femmes et à leurs activités et de mettre en place un système de monitoring pour tout ce qui a déjà été fait en ce sens.

Selon le président, 994 000 femmes ont vu certains de leurs problèmes résolus en 2023. 400 000 d’entre elles ont obtenu un travail et « 1914 jeunes filles issues de familles pauvres ont été admises à l’Université grâce à des subventions de l’Etat ».

Le média ouzbek Hook s’est penché sur les avantages accordés aux femmes en Ouzbékistan. Il explore dans cet article comment les mahallas (les quartiers, qui désignent à la fois un espace géographique et la structure sociale, ndlr) gèrent leur bien-être social et ce qu’il faut faire pour continuer à recevoir une aide de l’État.

Quand une femme a besoin d’un toit

Les femmes peuvent obtenir un prêt hypothécaire préférentiel si elles vivent dans des conditions sociales difficiles, par exemple si elles ont un handicap ou vivent dans une famille monoparentale avec enfants. Les programmes peuvent procurer des places en immeuble ou dans des maisons en zones rurales.

Dans les zones rurales, l’Etat soutient les femmes pour payer leur crédit hypothécaire. Dans les villes, l’État paie 10 % de la valeur de la demeure pour le premier versement. L’aide au paiement sur crédit dépend de la ville : 12 % à Tachkent, 10 % pendant les cinq premières années dans les autres villes et les zones rurales.

Les aides pour les mères

Depuis le 1er avril dernier, l’allocation pour la naissance d’un enfant n’est versée que pour le premier né. Pour obtenir cette allocation, il faut impérativement déclarer la naissance dans un délai d’un mois. Il est aussi possible d’obtenir des allocations pour le deuxième et le troisième enfant, mais seulement lorsque la mère est dans le « registre unique de protection sociale ». Cependant, pour les femmes enceintes et les mères, le gouvernement ne lésine pas sur les prestations.

Pour commencer, une femme enceinte qui travaille ne peut pas être licenciée ni voir son salaire réduit en raison de sa condition. Seulement, il y a un hic : l’employeur n’a qu’à utiliser un autre prétexte et le mettre par écrit. Ne pas engager une femme parce qu’elle est enceinte est aussi interdit.

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Il existe une exception : lorsque l’entreprise est en liquidation, une femme enceinte peut être licenciée. Dans ce cas, les autorités locales chargées de l’emploi répondent de trouver un autre travail et du paiement des allocations de chômage pour la nouvelle mère.

Il est également possible pour une femme enceinte de réduire sa charge de travail avec une justification médicale. Quand la décision est émise, la femme est libérée de tout travail, tout en gardant son salaire. Les femmes qui ont un enfant de moins de 14 ans (ou un enfant de moins de 16 ans avec des retards de développement) ou un membre de la famille à charge ayant constamment besoin de soins, peuvent demander une réduction de jours de travail ou une semaine à temps partiel.

Des aides proposées par la mahalla

Le décret sur la sauvegarde du salaire s’applique 70 jours avant et 56 jours après l’accouchement. En cas d’accouchement compliqué ou de naissance de deux ou plusieurs enfants, il s’agit de 70 jours après l’accouchement. Les congés peuvent être prolongés jusqu’à trois ans après l’accouchement, mais sans la sauvegarde du salaire. Pendant cette période, la femme ne perd pas son poste. Les pauses pour alaiter comptent comme heures de travail.

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Des aides peuvent être apportées même lorsqu’elles ne sont pas demandées. Voici l’histoire d’une mère de trois enfants sans emploi, qui a préféré garder l’anonymat :

« Je ne me suis adressée à personne. J’ai été appelée par les représentants de la mahalla et on m’a proposé des cours. J’ai refusé, car il fallait surveiller mes enfants. Après, le président de la mahalla m’a appelée et m’a demandé d’amener mon passeport et les certificats de tous mes enfants. Selon lui, l’État allait me verser 10 millions de soums (704 euros, ndlr). On m’a proposé un frigo, une cuisinière à gaz, une machine à coudre ou un congélateur. J’ai été très étonnée. L’année dernière, on a eu un frigo de l’Etat pour le Nouvel an. »

« Et je n’ai pas reçu les versements forfaitaires. Ils ont dit que nous n’étions pas une famille dans le besoin, comme on a une télé à écran plasma et une voiture. J’ai répondu : qu’on le donne à ceux qui en ont vraiment besoin. »

Devant le tribunal

En cas de jugement, l’Etat pourvoie aux dépenses juridiques si la question de la violation de l’égalité des genres est soulevée. Si la femme le veut, elle a droit à un avocat gratuit. Ces questions sont traitées par le Comité pour la famille et les femmes.

De plus, les femmes ne peuvent pas être condamnées à plus de 25 ans de prison.

Les droits des étudiantes

Le plus grand avantage pour une femme qui souhaite étudier réside sans doute dans le fait que l’Etat cherche des cadres. Ainsi, les femmes qui étudient dans des universités ou des écoles techniques dans le domaine de la construction, du transport, des services communaux, de l’agriculture et dans les sphères de service, peuvent étudier en recevant des subventions de l’État.

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Les étudiantes mères d’enfants de moins de trois ans ont le droit d’étudier en distanciel.

Devenir entrepreneuse

« Les femmes qui souhaitent mener des activités d’entrepreneur peuvent être formées grâce à un programme spécial, formulé auprès du hokim (équivalent du préfet, ndlr) de la région et de ses subdivisions, auprès du département de soutien à la mahalla et à la famille », stipule le décret « sur les mesures visant à renforcer les garanties des droits du travail et le soutien des activités entrepreneuriales des femmes ». Une question subsiste : où exaucer ce souhait ? Actuellement, des centres spécialement pour femmes sont créés, où il est possible de s’adresser. Les comités de mahalla peuvent aussi donner ces renseignements.

Depuis le 1er février dernier, les institutions d’études ouvrent des formations professionnelles pour femmes sur la création, le développement et la réussite des activités entrepreneuriales. L’État couvrira 70 % des dépenses pour la formation de chaque diplômée. Après avoir réussi la formation, il est possible d’emprunter auprès des centres une somme de 33 millions de soums (2 330 euros).

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Les femmes qui travaillent dans la construction de serres pour la croissance des fleurs, des fruits et légumes, qui vivent de l’élevage de bétail, de volailles, de la pisciculture et de l’apiculture, même si elles travaillent en tant que copropriétaires, peuvent obtenir un crédit forfaitaire jusqu’à 35 millions de soums (2 470 euros).

Il n’y a pas que le crédit. Les femmes entrepreneuses peuvent obtenir une subvention de l’État, entre sept et dix millions de soums pour monter leur business. Le comité pour la famille et les femmes de la République d’Ouzbékistan est à l’origine de certaines de ces actions, ainsi que les mahallas et le président.

Le « livre des dames »

« Le livre des dames » est une base de données pour identifier et résoudre les problèmes des femmes sans emploi qui ont besoin de soutien social, économique, juridique, psychologique ou professionnel. Le « livre des dames » est une fondation. Pour s’y inscrire, il faut impérativement s’adresser à la mahalla, déposer sa candidature et avoir plus de 30 ans.

Grâce à la fondation, les femmes sans emploi ayant besoin d’une aide sociale se forment et reçoivent des aides matérielles si besoin. Celles qui rencontrent des difficultés de logement reçoivent des indemnités de loyer ou ont accès à des logements sociaux. Des rénovations sont proposées pour les femmes sans soutien familial vivant dans la pauvreté et pour certaines femmes handicapées. De plus, l’Etat les aide à se soigner. L’essentiel de l’aide est un soutien matériel.

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« Nous offrons de l’aide aux personnes sans emploi. D’abord, il s’agit de formation gratuite et de subventions pour la création d’une entreprise. Les autres catégories reçoivent une aide matérielle ponctuelle. Vous pouvez également nous contacter pour des conseils médicaux, juridiques et psychologiques. Dans notre mahalla, le « livre des dames » compte 230 femmes. La plupart du temps, elles demandent une aide matérielle », explique Saodat Almanova, militante pour les droits des femmes du comité de mahalla Younous Toda.

L’aide matérielle est accordée une fois par année civile. Elle propose entre 680 000 (48 euros) et 1,36 million de soums (96 euros).

Que réserve le programme ?

Bientôt, l’Ouzbékistan comptera une académie pour filles, où s’organiseront des concours, des projets et des formations dans les domaines des professions modernes comme l’entrepreneuriat, le marketing, la conception graphique et d’autres. Le projet « Business-marathon » sera lancé pour apprendre aux femmes à fonder une entreprise.

Chavkat Mirzioïev, le président, a décidé d’améliorer l’accès aux soins : c’est ce qui occupera une grande place dans le soutien social aux femmes. Le plan prévoit que l’Etat financera 2 000 opérations chirurgicales lourdes. Les femmes enceintes et allaitantes recevront gratuitement de l’iode, tandis que les retraitées recevront du fer et de l’acide folique. 4 000 femmes qui se trouvent dans une situation difficile recevront un logement et 3 000 auront accès à des opérations médicales.

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L’État accorde une attention croissante à l’éducation, au développement et à l’entrepreneuriat des femmes. Cependant, le manque d’informations disponibles sur chaque type de prestation et la bureaucratie sont les inconvénients les plus évidents du système de soutien social. Pour qu’une femme à faible revenu obtienne un crédit, il lui faut passer par au moins trois instances et remplir un dossier conséquent.

Après tout, la « perfection » n’est promise que pour dans deux ans… Mais dès aujourd’hui, il est réellement possible d’obtenir une l’aide de l’État, même pour les femmes qui ne s’y attendent pas.

Amaliya Djalolova
Journaliste pour Hook

Boris Joukovsky
Editeur pour Hook

Traduit du russe par Alan Abdullaev

Edité par Paulinon Vanackère

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