L’histoire de l’Asie centrale est souvent associée à la Route de la Soie, célèbre et antique route commerciale traversée par les marchandises du monde entier, reliant l’Occident à l’Orient et inversement. Aujourd’hui, ce n’est assurément plus la soie qui traverse l’Asie centrale, mais des substances opiacées, essentiellement l’héroïne. Et, depuis peu, des substances chimiques venues de l’Occident trouvent leur chemin sur l’ancienne Route de la Soie.
Au Vème siècle après J-C, au carrefour entre l’Europe et l’Asie, se trouvaient des marchands, commerçants et négociants, des chameaux se reposant avant de reprendre la route, des lettrés allant et venant du monde entier. Soie, or, coton, argent, étaient transportés de l’Extrême-Orient jusqu’en Occident sur ce qui était alors le plus vaste réseau commercial du monde. Cet ensemble de routes qui traversait les cinq Républiques centrasiatiques actuelles, Kazakhstan, Kirghizstan, Ouzbékistan, Tadjikistan et Turkménistan, était appelé Route de la Soie.
Les grandes découvertes du XVème siècle ont marginalisé le rôle commercial de l’Asie centrale en exploitant des voies maritimes plus rapides et rentables pour le transport de marchandises. La région est restée toutefois une interface entre Asie et Europe. Et l’on trouva assez rapidement une nouvelle utilité à ce corridor centrasiatique, désormais « autoroute de l’héroïne ».
Opium des peuples
Les anciennes Républiques soviétiques d’Asie centrale se trouvent sur l’une des deux principales routes commerciales acheminant l’héroïne d’Afghanistan, pays qui représente presque un tiers de la production mondiale d’opium. L’opium, ainsi que l’héroïne qui en est issue, transite par ladite « route du nord » traversant le Tadjikistan, l’Ouzbékistan, puis le Kirghizstan ou le Turkménistan, avant de passer le Kazakhstan pour arriver jusqu’en Russie ou en Europe.
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L’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) estime que, chaque année, 25% de l’opium afghan et 15% de son héroïne sont transportés illégalement vers l’Europe par cette unique route du nord. Le chiffre d’affaires de ce marché est estimé à quelques 13 milliards de dollars annuels, ce qui représente le PIB du Tadjikistan et du Kirghizstan réunis.
L’Asie centrale, paradis des trafiquants de drogues
Outre la situation géographique, le contexte politique général de l’Asie centrale contribue à en faire un corridor de la drogue particulièrement convoité. Ici, contrairement à l’Amérique latine, pas de guerres fratricides entre barons de la drogue et autres cartels : la criminalité et les homicides en lien avec la drogue sont relativement peu nombreux. Le trafic de drogue en Asie centrale est beaucoup plus profitable et bien moins risqué. En effet, les groupements criminels liés à la drogue ont des contacts jusque dans les hautes sphères du pouvoir. La corruption à grande échelle, ainsi qu’une participation parfois active de hauts fonctionnaires, facilitent considérablement le transport des substances d’un pays à l’autre.
Depuis l’adhésion du Kazakhstan et du Kirghizstan à l’Union eurasiatique et l’allégement des contrôles aux frontières qui s’en est suivi, la route de l’héroïne jusqu’à la Russie est encore plus largement praticable. De là, l’Europe n’est plus très loin.
À Almaty, ancienne capitale du Kazakhstan, le Centre régional d’Information et de Coordination de l’Asie centrale (CARICC pour Central Asian Regional Information and Coordination Centre en anglais) fournit les chiffres officiels concernant les quantités de drogues saisies. Au premier semestre 2017, environ 120 . . .
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