BRUXELLES-ASTANA : UN NOUVEAU PONT CLIMATIQUE ? – Le changement climatique continue d’avoir un sérieux impact en Asie centrale, nécessitant une action urgente et coordonnée pour minimiser ses conséquences négatives. Une réponse efficace à ces défis nécessite une coopération fructueuse entre l’UE et les pays d’Asie centrale.
Comment les implications économiques, sociales et géopolitiques du changement climatique se manifestent-elles en Asie centrale ? Quels sont les cas d’urgence qui nécessitent une action immédiate ? Les mesures d’atténuation sont-elles suffisantes ? Pour répondre à ces questions, Novastan lance « Bruxelles-Astana, un nouveau pont climatique ? », une série d’articles consacrés au changement climatique au Kazakhstan, un projet fondé par Konstantin Blondeau-Mikhaïlov et Camille Ramecourt.
Tous les articles de la série sont disponibles ici.
La Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit au Kazakhstan
Dana Yermolyonok est chargée de coordonner le soutien de la Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) à l’action contre le changement climatique au Kazakhstan. L’experte a partagé avec Novastan sa vision de la situation en Asie centrale, considérant les questions d’adaptation et d’atténuation du changement climatique.
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« Cela signifie que nous sommes confrontés non seulement à une augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes, mais aussi à la perspective de pertes économiques et d’instabilité dans divers secteurs de la société », déclare-t-elle.
La coopération dans le cadre de la lutte contre les effets du changement climatique
Dana Yermolyonok attire l’attention sur l’importance de prendre en compte les dommages économiques qui pourraient être causés par le changement climatique, en particulier dans les domaines agricole et des infrastructures.
« Même dans différents scénarios climatiques, il est clair que le problème de la pénurie d’eau sera important. Il ne s’agit pas seulement d’une pénurie générale d’eau, mais aussi d’une augmentation des événements extrêmes tels que les sécheresses, les inondations ou plusieurs jours consécutifs de canicule. Tout cela devrait s’intensifier, sans parler de l’état de danger des glaciers », conclut l’experte de la GIZ.
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Selon le rapport du ministère de la Protection de l’environnement du Kazakhstan, les glaciers de montagne dans le Sud-Est du pays perdent environ 1 % de leur volume de glace par an. Selon les projections, il faut s’attendre à la poursuite d’une dégradation intensive des glaciers dans la région dans un avenir proche. Ainsi, la glaciation sur le versant Nord de l’Alataou Ileïsky pourrait pratiquement disparaître d’ici la fin du XXIème siècle, et celle de l’Alataou Jetysouïsky encore plus tôt.
« L’analyse des changements dans les conditions d’humidité au Kazakhstan a montré que dans le contexte de l’augmentation attendue de la température de l’air, une augmentation des précipitations, même de 20-25 %, n’aura pas d’impact favorable sur les écosystèmes, l’agriculture et les ressources en eau », prévoit le Programme de développement des Nations unies (PNUD) dans son rapport.
Gérer les ressources en eau
En octobre dernier, le ministère des Ressources en eau et de l’Irrigation du Kazakhstan et la GIZ ont signé un accord sur la mise en œuvre d’un programme régional pour la Gestion des ressources en eau en Asie centrale dans le cadre du changement climatique. Ce programme, Green Central Asia, soutenu par l’Allemagne et les cinq pays d’Asie centrale, vise à gérer les ressources en eau en tenant compte du climat.
La coopération avec le ministère des Ressources en eau et de l’Irrigation de la République du Kazakhstan, ainsi qu’avec les organismes de bassin de l’Amou-Daria et du Syr-Daria, comprend des mesures pour une utilisation efficace de l’eau et des projets pilotes pour l’adaptation au changement climatique.
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Dans un entretien avec Novastan, Vincent Caupin, chef du bureau Asie centrale de l’Agence française de développement (AFD) basé à Tachkent, souligne l’action des agences de développement dans la région. L’AFD a ainsi investi depuis 2016 1,3 milliard d’euros en Ouzbékistan, sur des projets notamment liés.
Après la visite d’Emmanuel Macron à Astana en novembre dernier, le bureau étend ses activités au Kazakhstan sur la base de ses bons résultats en Ouzbékistan. Il partage également les bonnes pratiques nées de son expérience, parmi lesquelles la Country Platform, où les différentes agences internationales coordonnent leurs efforts à travers des plateformes collaboratives pour assurer une mobilisation et une utilisation rapides de l’aide extérieure, selon l’agence des réformes stratégiques de l’Ouzbékistan, qui coordonne la plateforme.
Des changements de comportement et des difficultés de compréhension
Cela conduit à des problèmes de consommation, l’intensité carbone des émissions en Ouzbékistan étant au même niveau qu’en Chine. Avec une démographie croissante mais des ressources naturelles de moins en moins disponibles, la nécessité d’une politique publique est devenue urgente pour le gouvernement ouzbek.
C’est ainsi qu’est né un projet sur l’économie verte auquel l’AFD participe, en s’inspirant largement de l’expérience française en matière de comptabilité des dépenses publiques vertes, afin de créer des outils innovants pour l’approvisionnement durable de l’Ouzbékistan.
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Selon Dana Yermolyonok, la tendance mondiale vers un modèle de développement à faible émission de carbone devient une partie intégrante de l’avenir. Par exemple, les modèles d’entreprise basés sur de fortes émissions de gaz à effet de serre deviennent non rentables à la lumière de nouveaux mécanismes tels que la taxe carbone aux frontières de l’Union européenne.
Le privé doit s’adapter et participer
Par conséquent, les entreprises peuvent s’adapter à ce qui se passe. « Après avoir évalué les perspectives à long terme du marché, les entreprises peuvent décider du modèle d’entreprise qui leur convient : investir maintenant pour réduire les émissions et commercialiser librement leurs produits ou payer des taxes supplémentaires », estime l’experte de GIZ.
À l’occasion du sommet mondial des Nations unies sur le climat qui s’est tenu à Dubaï en décembre dernier, le président du Kazakhstan, Kassym-Jomart Tokaïev, a souligné l’importance de la participation du secteur privé à la résolution des problèmes liés au climat.
Je fais un don à NovastanLe président a fait part de la volonté de son pays de devenir un important fournisseur de minéraux essentiels à la décarbonisation du monde. Il a attiré l’attention sur le fait que, malgré les efforts communs de tous les pays de la région, l’Asie centrale sera inévitablement confrontée à une augmentation de la température pouvant atteindre 2,5 degrés d’ici 2050.
Cela entraînera l’assèchement des principaux cours d’eau et lacs, ainsi qu’une pénurie d’eau potable et d’eau d’irrigation dans la région. À cet égard, il a proposé d’accroître le soutien au Fonds international pour le sauvetage de la mer d’Aral.
Réduire les émissions de gaz à effet de serre
En février 2023, le Kazakhstan a approuvé une stratégie visant à atteindre la neutralité carbone d’ici 2060. L’investissement dans les technologies à faible teneur en carbone pour atteindre la neutralité carbone nécessite un montant estimé à 610 milliards de dollars (569 milliards d’euros), soit 19,6 % du capital brut.
Plus de la moitié des fonds sont réorientés des produits de base vers les secteurs verts, les 223,7 milliards de dollars restants (208,8 milliards d’euros) étant de nouvelles ressources. Selon les informations spécifiées dans la stratégie, le prix de la décarbonisation est relativement bas – 65,4 dollars (61 euros) par tonne d’équivalent CO2.
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En avril 2023, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a lancé un projet avec le gouvernement kirghiz. Ce projet permettra au pays d’être mieux préparé pour faire face aux catastrophes naturelles et d’améliorer la gestion des forêts et des pâturages, en conciliant croissance économique et protection de l’environnement.
Discussion sur l’avenir, efforts conjoints
En conclusion, les experts de la GIZ et de l’AFD rappellent que de nombreux projets ont été lancés dans le domaine des énergies renouvelables en Asie centrale avec la participation d’organisations telles que l’Agence des Etats-Unis pour le développement international (USAID), l’UE, la Banque asiatique de développement (BAD), la GIZ, l’AFD et d’autres. Ces initiatives couvrent un large éventail de questions, allant de l’organisation du réseau et du dispatching à l’expérience de l’UE, qui peut être appliquée dans la région.
Les aspects techniques tels que l’équilibrage du réseau et les questions de stockage de l’énergie sont activement discutés et développés, en tenant compte des réalités de l’Asie centrale. « Je pense que la demande de coopération entre différents pays, y compris les pays européens, se poursuivra, car il s’agit d’une sorte d’effort commun », conclut l’intervenante de la GIZ.
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Dana Yermolyonok exprime l’espoir que les habitants d’Asie centrale pourront surmonter les stéréotypes liés à la perception du changement climatique comme quelque chose de « lointain et d’incompréhensible ». Selon elle, il est important de communiquer largement sur l’impact du changement climatique sur la vie quotidienne. Des projets comme celui de la GIZ au Kazakhstan et d’autres projets sociaux et éducatifs peuvent jouer un rôle clé en informant les gens de l’impact du changement climatique sur leurs réalités quotidiennes.
Pour Vincent Caupin, le projet de coopération a des retombées importantes et la présence future de l’AFD au Kazakhstan renforcera l’action publique locale en matière d’environnement, ce qui sera bénéfique pour la stabilité et la croissance de la région centrasiatique.
« Bruxelles-Astana, un nouveau pont climatique ? » est une série d’articles consacrés au changement climatique en Asie centrale. Tous les articles de la série sont disponibles ici. Ce projet a été fondé par Camille Ramecourt et Konstantin Blondeau-Mikhaïlov.
Cherzod Babakoulov
Camille Ramecourt
Konstantin Blondeau-Mikhaïlov
Rédacteurs pour Novastan
Relu par Eléonore Jeannot Ventura
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