Une nouvelle vague de blocages massifs touche Internet au Turkménistan. Contrairement aux campagnes précédentes, ces restrictions relèveraient davantage d’une stratégie de profit individuel que d’un impératif politique.
Depuis début juillet, une nouvelle série de blocages a frappé Internet au Turkménistan. Selon le média indépendant Turkmen.news, basé au Pays-Bas, des pans entiers du Web sont devenus inaccessibles pour les internautes turkmènes. Les autorités ont inscrit dans leurs listes noires plusieurs sous-réseaux numériques de grande ampleur, chacun contenant plus de 65 000 adresses IP.
La censure numérique n’est pas nouvelle dans ce pays le plus fermé d’Asie centrale, où les réseaux sociaux, les médias indépendants et les plateformes d’opposition sont inaccessibles depuis plusieurs années. Mais cette fois-ci, le blocage viserait moins à contrôler l’information qu’à générer des revenus pour les agents chargés de la cybersécurité, révèle Turkmen.news.
La censure comme stratégie commerciale
Des sources locales et des experts interrogés par ce média indépendant affirment en effet que les nouvelles restrictions s’inscrivent dans une logique de profit personnel. Des agents du service de cybersécurité national bloqueraient volontairement des segments entiers d’Internet avant de proposer aux usagers des solutions payantes pour contourner ces interdictions.
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Parmi ces solutions figurent des licences « OpenVPN » personnalisées, proposées à partir de 1 000 manats (environ 50 euros) par mois. Il est aussi possible d’acheter une place sur les « listes blanches » d’accès pour 2 000 manats (environ 100 euros) par mois qui offrent un accès plus complet à Internet.
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Compte tenu du fait que le salaire moyen tuekmène s’élève à 60 dollars (environ 52 euros), ces prix sont tout simplement exhorbitants, et seule l’élite du pays semble pouvoir accéder à la totalité d’Internet. Dans le passé, les blocages ont été détectés lors d’évènements importants tels que l’inauguration de la ville d’Arkadag, en 2023, ou des événements politiques sensibles, tels qu’une explosion d’un dépôt proche d’Achgabat, en juillet 2011, qui avait fait 15 morts officiellement. Aujourd’hui les autorités n’évoquent même plus de justification publique sur les restrictions à l’Internet dans le pays.
Un impact désastreux sur la cybersécurité et l’économie
Cette nouvelle restriction d’Internet, orchestrée à des fins lucratives, fragilise significativement la cybersécurité du pays. À cause du prix des VPNs officiels – y compris ceux fournissant les dernières mises à jour antivirus comme Bitdefender ou certains services Google – les citoyens doivent recourir à des VPN non certifiés, souvent fournis par des canaux informels. Ces outils exposent leurs données et leurs appareils à des risques accrus d’attaques ou d’intrusions extérieures.
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Sur le plan économique, les conséquences sont tout aussi sévères. Selon le média en ligne turkmène Progres.Online, les coupures et restrictions fréquentes coûtent à l’économie turkmène environ 348 000 dollars (environ 300 000 euros) par jour, soit près de 127 millions dollars (environ 110 millions d’euros) par an. Cependant, il semble que ce soit le prix à payer à payer pour Achgabat afin de contrôler sa population.
Evan Chaisson
Rédacteur pour Novastan
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Vincent Gélinas, 2025-07-28
Pourquoi les RPV « non certifiés » (ceux qui ne sont pas offerts par l’état?) exposent les données à des risques accrus?
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