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Les influenceurs religieux toujours plus populaires sur les réseaux sociaux au Kazakhstan

Au Kazakhstan, les influenceurs religieux sont très suivis. Les réseaux sociaux leur permettent d'avoir une plus grande proximité avec leurs fidèles, malgré un manque d'encadrement de ces pratiques.

Rédigé par :

La rédaction Emma Jerome 

Edité par : nchaudagne

Traduit par : fhamoudi

Cabar

Mosquée Astana
La grande mosquée d'Astana, achevée en 2022. Photo: Basil D Soufi/Wikimédia Commons.

Au Kazakhstan, les influenceurs religieux sont très suivis. Les réseaux sociaux leur permettent d’avoir une plus grande proximité avec leurs fidèles, malgré un manque d’encadrement de ces pratiques.

La popularité des influenceurs religieux auprès des Kazakhs ne recule pas. « La raison de cette popularité est qu’entre le prêtre et le croyant, il n’y a pas de barrière. Surtout quand le prêtre est sur les réseaux sociaux : on lui pose des questions et il répond immédiatement. C’est de l’accessibilité, de la sincérité, des pensées pures », explique Alekseï Gavrilov, prêtre blogueur au Kazakhstan.

L’arrivée des réseaux sociaux a permis à ces prêcheurs, autant imams que prêtres ou d’autres confessions, car la société kazakhe est multiconfessionnelle, d’agrandir leur auditoire et d’augmenter leur popularité. Mais l’autre facteur qui a poussé les fidèles à chercher leur spiritualité sur Internet est la pandémie, qui a fait fermer pendant plusieurs mois tous les lieux de culte.

Une recherche de proximité avec une attention portée aux jeunes

Les réseaux sociaux permettent de diffuser une autre approche de la religion. En effet, ils apportent une nouvelle proximité entre les prêcheurs et leur auditoire. Ils utilisent le direct, lors duquel ils peuvent répondre instantanément aux questions qui leurs sont posées. De plus, les influenceurs peuvent aborder le quotidien de la religion, ce qui est autorisé et interdit.

« Les thèmes des sermons sur les réseaux sociaux sont davantage tournés vers le format questions-réponses. La population est probablement davantage intéressée par des questions du quotidien, d’un caractère personnel. Les gens posent des questions sur les obligations sociales en famille, sur l’éducation d’enfants et d’adolescents », raconte Nourmouhammed Meïmankhoja, collaborateur scientifique de l’Institut de philosophie, de politologie et des études religieuses du Comité des sciences du ministère des Sciences et des Etudes supérieures du Kazakhstan.

Plusieurs grands imams du Kazakhstan sont devenus des influenceurs religieux. Parmi eux se trouvent l’imam d’Almaty, Tolé Bi Ersin Amré, ou encore d’autres imams d’envergure régionale ou nationale. Néanmoins, l’imam le plus célèbre sur les réseaux est Nourlan Baïjigitouli. Il est surnommé l’imam-TikTokeur et est suivi par près de 405 000 abonnés sur cette plateforme. Il s’autodéfinit comme « un imam, un érudit religieux, un théologien et un psychologue ».

Un imam TikTokeur

Lui aussi met l’accent sur la proximité et sur l’importance de parler du quotidien. « Si je m’asseyais simplement pour raconter que tout le monde va mourir, si je prêchais tout simplement, je n’aurais probablement pas accumulé autant de spectateurs. La jeunesse ne serait pas venue vers moi. La principale raison d’utiliser des anecdotes et de converser dans une langue qui parle aux jeunes est d’attirer leur attention sur l’islam », raconte-t-il dans une interview.

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La population chrétienne du Kazakhstan a également des prêtres devenus viraux sur les réseaux sociaux et sur Internet. Le prêtre Alekseï Gavrilov, originaire du Nord du Kazakhstan, suivi par 24 000 abonnés sur TikTok, en fait partie. Il explique ainsi que « le réseau le plus actuel est TikTok. Parce qu’ici, c’est possible de passer en direct et ça intéresse les gens quand un vrai prêtre discute avec eux ».

La recherche de proximité et de réponses directes à des questions spirituelles est une des raisons de la popularité des hommes religieux sur les réseaux sociaux. De plus, ils ciblent une population jeune qui cherche à se construire et qui utilise les réseaux sociaux quotidiennement.

Une activité difficile à réglementer

Au Kazakhstan, la diffusion de contenu religieux est interdite en dehors des lieux de culte, sauf détention d’une autorisation délivrée par les autorités judiciaires. L’article 490 du code des infractions administratives permet de pénaliser la production de contenu religieux sur Internet. En effet, il est possible d’être contraint de payer une amende, et cela a été le cas de la journaliste Roufia Moustafine en juillet 2022, suite à une interview avec le principal imam de la mosquée de Petropavlovsk au Kazakhstan.

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Nourmouhammed Meïmankhoja prévient qu’il pourrait y avoir des dérives à la diffusion de contenu religieux sur les réseaux sociaux. « Les conférences et les vidéos des prêcheurs de courants non conventionnels peuvent avoir un sens peu fiable et déformer des postulats religieux », affirme-t-il. C’est pourquoi il prône l’idée que « certifier les prêcheurs sur Internet est nécessaire pour définir le niveau de légalité de leurs mots, de leurs propos, de leurs aspirations, lesquels ne doivent pas contredire les principes de l’État laïque et de l’accord interconfessionnel de la société. »

Néanmoins, la volonté de réglementer et de certifier les prêcheurs semble faible. C’est ce que soutient Talgat Temirbaïev, enseignant de la chaire d’études religieuses de la culture islamique de l’Université égyptienne Nour-Moubarak. Pour lui, « essayer de contrôler le flux externe sur Internet est en principe impossible ».

Aïane Oryntaï
Journaliste pour Cabar

Traduit du russe par Fatimetou Hamoudi

Edité par Naïs Chaudagne

Relu par Emma Jerome

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