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Kirghizstan : des journalistes dénoncent des tentatives de piratage de leurs comptes

Des journalistes indépendants kirghiz ont signalé qu'ils étaient confrontés depuis plusieurs mois à des tentatives de piratage de leurs réseaux sociaux professionnels. Les médias parlent de « pressions incessantes sur les journalistes », mais le président kirghiz Sadyr Japarov nie en bloc.Novastan reprend et traduit ici un article publié le 28 avril 2022 par notre version anglaise.Les pressions exercées sur les journalistes kirghiz semblent avoir atteint un nouveau sommet. Kloop rapporte que les tentatives de piratage auraient atteint leur apogée en février 2022, lorsque les réseaux sociaux de plusieurs journalistes ont été attaqués.Ces attaques auraient commencé plusieurs mois auparavant. « Dans les derniers jours de janvier et début février, deux journalistes ont subi des tentatives de piratage de leurs comptes Telegram. Deux personnes voulaient pirater Facebook et plusieurs voulaient les accès de Telegram », a déclaré Dina Maslova, rédactrice en chef de Kaktus Media. Des tentatives de piratage de deux comptes ont été faites à partir d'un téléphone Xiaomi Redmi A7 et à partir de la même adresse IP.

Journalistes Piratages Kirghizstan
Des journalistes kirghiz dénoncent des tentatives de piratage de leurs comptes (illustration).

Des journalistes indépendants kirghiz ont signalé qu’ils étaient confrontés depuis plusieurs mois à des tentatives de piratage de leurs réseaux sociaux professionnels. Les médias parlent de « pressions incessantes sur les journalistes », mais le président kirghiz Sadyr Japarov nie en bloc.Novastan reprend et traduit ici un article publié le 28 avril 2022 par notre version anglaise.Les pressions exercées sur les journalistes kirghiz semblent avoir atteint un nouveau sommet. Kloop rapporte que les tentatives de piratage auraient atteint leur apogée en février 2022, lorsque les réseaux sociaux de plusieurs journalistes ont été attaqués.Ces attaques auraient commencé plusieurs mois auparavant. « Dans les derniers jours de janvier et début février, deux journalistes ont subi des tentatives de piratage de leurs comptes Telegram. Deux personnes voulaient pirater Facebook et plusieurs voulaient les accès de Telegram », a déclaré Dina Maslova, rédactrice en chef de Kaktus Media. Des tentatives de piratage de deux comptes ont été faites à partir d’un téléphone Xiaomi Redmi A7 et à partir de la même adresse IP.

D’après l’analyse des données de piratage, la première attaque coordonnée aurait eu lieu le 8 février 2022, jour précédent les manifestations devant les bureaux de Kloop et Kaktus. La journaliste Aïdaï Tokoïeva a signalé qu’elle avait été piratée à plusieurs reprises.« Je me souviens à quel point j’étais anxieuse au début, quand ils ont essayé de pirater mes comptes Telegram et Facebook. J’étais décontenancée, car je n’ai stocké rien de compromettant dans ma correspondance et mon téléphone. Je prends des mesures de protection comme l’identification à deux facteurs, voire plus. Au moins, je fais de mon mieux, mais si les hackers et les spécialistes insistent, je ne pourrai plus rien faire », craint-elle.

D’après le président kirghiz, « il n’y a aucune pression »

Selon le média Kloop, la plupart des attaques ont eu lieu le 18 février 2022, date à laquelle au moins huit journalistes ont été confrontés à des tentatives de piratage de leurs comptes. Ils travaillaient pour des médias tels que Kloop, Kaktus Media et Temirov Live. Les attaquants ont réussi à plusieurs reprises à accéder au compte Facebook d’un journaliste de Temirov Live. Ils ont aussi réussi à accéder, via un code SMS, à des comptes liés à l’opérateur mobile MegaCom.Le 25 avril 2022, le président kirghiz Sadyr Japarov a déclaré dans une interview accordée au média d’État kirghiz Kabar qu’il n’y avait pas de pression sur la liberté d’expression au Kirghizstan, mais a accusé les journalistes de publier de fausses informations.« Il n’y a aucune pression. Chacun écrit sur les réseaux sociaux ce qu’il veut. Mais il y a des représentants des médias qui essaient d’échapper à la responsabilité de leurs crimes puis crient quand ils sont arrêtés. Ils mènent des pseudo-enquêtes journalistiques, publient de fausses informations, discréditent les gens, sèment la confusion dans la société », a déclaré Sadyr Japarov.

Temirov Live visé par des poursuites judiciaires

Simultanément, le président kirghiz a publiquement accusé le journaliste d’investigation Bolot Temirov de falsification de documents. Bolot Temirov est connu pour avoir publié des enquêtes sur la corruption et le népotisme du pouvoir, sur sa chaîne YoutubeTemirov Live. Le 19 avril 2022, la police a ouvert trois procédures pénales contre Bolot Temirov pour falsification de documents et franchissement illégal de la frontière. Selon la police, il y a 14 ans, Bolot Temirov était citoyen russe et a falsifié une carte d’identité militaire pour obtenir la nationalité kirghize. Avec ces documents, il aurait traversé la frontière du Kirghizstan des dizaines de fois.Lire aussi sur Novastan : Sadyr Japarov, le chuchoteur du peupleSadyr Japarov déclare àKabarque « Bolot Temirov a volé la carte d’identité militaire de quelqu’un d’autre, y a collé sa photo, a changé son nom et sur la base de cette carte d’identité militaire, il a reçu un passeport kirghiz à Ouzguen. En sa qualité de journaliste, cette affaire prend une résonance particulière. Y a-t-il une loi contre les poursuites ? En quoi est-il meilleur que les autres ? Il répondra sur un pied d’égalité avec les autres. »La veille du dépôt des accusations, Temirov Live a publiéune enquête sur le chef du Comité d’État pour la sécurité nationale,Kamtchybek Tachiev, un ami proche de Sadyr Japarov.Les journalistes ont déclaré que depuis mars 2022, Moka Group, la société appartenant au fils de Kamtchybek Tachiev, a remporté des appels d’offres d’un montant total de 250 000 soms (2 883 euros). Le groupe Moka était le seul participant à ces appels d’offres, violant ainsi les règles de la concurrence.

Les enquêtes ne sont pas les bienvenues

Ces pressions sur Bolot Temirov ne sont pas nouvelles. En effet, quatre poursuites pénales ont déjà été engagées contre lui. En janvier 2022, une première plainte a été déposée contre lui pour fabrication et détention de stupéfiants. Le Comité d’État pour la sécurité nationale a mené durant la nuit du 22 janvier 2022 une perquisition inattendue dans le bureau de Bolot Temirov. Ils y ont trouvé un paquet de haschisch de 7,8 grammes dans une poche de son pantalon.Les employés ont déclaré le 23 janvier 2022 que quelques mois auparavant, leurs bureaux avaient été mis sur écoute et filmés avec des caméras cachées, avant que les employés ne soient soumis au chantage. De plus, des inconnus ont divulgué une vidéo privée filmée en caméra cachée d’une des employées de Temirov Live, l’accusant d’avoir eu des relations sexuelles avec des occidentaux proches du média.

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Peu de temps avant la première arrestation, Bolot Temirov avait publié une enquête selon laquelle les proches de Kamtchybek Tachiev devenaient, selon ses dires, des magnats du pétrole. Temirov Live a révélé qu’après la promotion de Kamtchybek Tachiev en 2020, son neveu Baïgazy Matisakov a dirigé la compagnie pétrolière d’État kirghize. Selon les journalistes, en juin 2021, la compagnie a vendu 3 600 tonnes de carburant à une société locale, propriété de son ami, pour 22 centimes le litre. Region Oil l’a revendu à l’Ouzbékistan pour 36 centimes le litre. Ainsi, après avoir conclu un accord défavorable, Baïgazy Matisakov a permis à la société affiliée de gagner 37 millions de soms (415 000 euros).De façon générale, les médias kirghiz se plaignent depuis plusieurs années des pressions exercées sur les journalistes et sur la liberté d’expression. En mars 2021, un rassemblement a été organisé à Bichkek contre des organisations non gouvernementales et Radio Azattyk, branche kirghize du média américain Radio Free Europe. Le 9 février 2022, un rassemblement a eu lieu à Bichkek pour la fermeture des publications Kloop et Kaktus Media. Les participants à ces manifestations accusent ces médias de recevoir de l’argent de l’Occident afin de déstabiliser le pays.

Aïzirek Imanalieva Rédactrice pour Novastan à Bichkek

Traduit de l’anglais par Marc Gruber

Édité par Johanna Regnaud

Relu par Emma Jerome

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