Le 10 juin 2010, de violentes émeutes éclatent à Och, dans le sud du Kirghizstan. Dans le sillage de la chute du président Kourmanbek Bakiev, en avril 2010, les tensions intercommunautaires s’intensifient, avant de se transformer en véritables « pogroms » ciblant la minorité ouzbèke. 10 ans après les faits, Novastan fait le point sur ce que l’on sait.
Du 10 au 14 juin 2010, la ville d’Och, située dans le sud-ouest du Kirghizstan, est le théâtre de violents affrontements ethniques, entre des citoyens de nationalité kirghize et d'autres de nationalité ouzbèke. Le terme désigne ici l'origine ethnique des participants, par ailleurs tous citoyens du Kirghizstan, suivant la tradition établie par l'URSS de distinguer citoyenneté et nationalité. Ces violences, dont le bilan reste incertain, font des centaines de morts et des dizaines de milliers de déplacés, principalement parmi les Ouzbeks. Les forces de sécurité, dépassées ou complices, mettent plusieurs jours à rétablir l’ordre.
Que s’est-il passé dans le sud du Kirghizstan en juin 2010 ?
Les violences semblent trouver leur origine immédiate dans une dispute ayant éclaté à proximité d’un casino entre Kirghiz et Ouzbeks, le 10 juin dans la soirée, à Och. Selon un rapport de l’ONG International Crisis Group, le 11 juin dans la matinée, des rumeurs de viols et de meurtres d’étudiantes kirghizes par des hommes ouzbeks se répand parmi la population kirghize. L’incident, qui n’a probablement jamais eu lieu, convainc de nombreux jeunes Kirghiz de la ville et des villages environnants de se mobiliser contre les Ouzbeks. « Ces puissantes rumeurs, que beaucoup de Kirghiz ont crues, ont encouragé leur mobilisation, particulièrement dans les régions rurales et montagneuses », souligne ainsi le politologue kirghiz Joldon Koutmanaliev, interrogé par Novastan.
Ces évènements marquent le début de quatre jours d’affrontements à grande échelle à Och et dans la ville de Djalal-Abad, située à une heure et demie en voiture plus au nord. Les Ouzbeks installent des barricades à l’entrée de leurs quartiers, avant que la foule kirghize, aidée par plusieurs véhicules blindés de transport de troupes de l’armée kirghize, ne parvienne à y pénétrer. S’ensuivent alors plusieurs jours de pillages, de destructions et de meurtres.
Le bilan des victimes est, encore aujourd’hui, l’objet d’une controverse. Selon le rapport de la commission d’enquête internationale et indépendante chargée par le gouvernement intérimaire kirghiz de faire la lumière sur les évènements, 470 personnes auraient été tuées. Le correspondant au Kirghizstan du média russe Komsomolskaïa Pravda évoque, quant à lui, un bilan supérieur à 1 000 décès.
Doit-on parler de violences interethniques ou de « pogroms » anti-Ouzbeks ?
Le bilan des victimes et des destructions montre que les violences initiales entre communautés ont rapidement tourné aux « pogroms ethniques » anti-Ouzbeks, comme l’a affirmé l’anthropologue français Boris Petric. En effet, selon un rapport de l’ONG américaine Human Rights Watch (HRW), la « vaste majorité » des 2 000 bâtiments détruits . . .
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