Un groupe de scientifiques tadjiks a parcouru plus de 3 300 kilomètres afin d’évaluer l’état des glaciers du pays. Ils ont découvert un lac, formé après la fonte du « glacier de la Société géographique russe », dans le Pamir.
Novastan reprend et traduit ici un article initialement publié par le média tadjik Asia-Plus.
Cet été, des scientifiques du Tadjikistan se sont intéressés à plusieurs petits pics du col de Varzob, dans l’ouest du pays, et à des montagnes de haute altitude dans le Pamir. Après avoir parcouru 3 000 kilomètres en voiture et 300 autres à pied, ils ont analysé les résultats de leur étude en novembre dernier.
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Interrogé à la radio Ozodi au retour de l’expédition, Abdulhamid Kayoumov, le directeur du Centre d’Étude des glaciers du Tadjikistan, a estimé que les recherches en cours tendaient à prouver les profonds changements subis par le glacier dit « de la Société géographique russe ».
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« On peut observer les conséquences du changement climatique sur ce grand glacier du centre du Pamir. Un énorme lac, atteignant par endroits 200 mètres de long, s’est formé sur sa partie supérieure. Ce genre de phénomène est toujours alarmant. Sous l’action de ce bassin, le glacier peut se disloquer et condamner l’embouchure de la rivière Abdukahor. En cas d’inondations, ce barrage naturel peut alors se rompre et menacer les habitants de la vallée du Vanch », analyse le scientifique.
Surveillance par satellites
Abdulhamid Kayoumov a mis en exergue le souhait des experts de contrôler l’état des glaciers grâce à un système de satellites. Des stations terrestres ont déjà été construites sur nombre de glaciers, ce qui permet de visualiser leurs mouvements avec une précision d’un dixième de seconde. Ces installations ont été implantées pour la première fois sur le sol tadjik.
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Le glacier de la Société géographique russe est un glacier en forme d’arbre situé dans le centre du Pamir. D’une superficie de 64,4 km², il est situé en amont de la rivière Vanch, à la jonction entre la crête de l’Académie des Sciences et la chaîne de Darvaz, dans le sud du Tadjikistan.
Abdulhamid Kayoumov rappelle qu’en 1968 et en 1972, le mouvement du glacier des Ours avait entraîné le blocage de l’embouchure de l’Abdukahor mais l’alerte avait été donnée pour les habitants des villages voisins. Les eaux retenues avaient formé un lac artificiel de 80 millions de mètres cube d’eau pour une profondeur atteignant 110 mètres. En 2005, la tragédie n’avait pu être évitée : la masse d’eau avait percé le barrage à proximité de la localité de Dachti, dans la région de Rochtkal’a, dans le sud du pays, entraînant la mort de 25 personnes et endommageant de nombreuses maisons.
Aujourd’hui, près de la moitié des zones occupées par les glaciers en Asie centrale se situent au Tadjikistan. Plus de 8 000 glaciers y occupent une superficie de 8 500 km². Le Centre d’étude des glaciers du Tadjikistan a été créé en 2018, avec pour principale mission d’étudier et de contrôler de façon permanente les glaciers et les autres sources d’eau du pays.
Appel au calme
De son côté, le Comité des situations d’urgence du Tadjikistan a appelé au calme. Le responsable du département principal du Comité, chargé de la protection de la population et du territoire, le colonel Djamched Kamolov, a déclaré à l’agence AP que le glacier en question était placé sous surveillance constante par le Centre d’étude des glaciers de l’Académie des sciences du Tadjikistan ainsi que par le Comité de sauvegarde de l’environnement du Tadjikistan.
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« Ils exercent un contrôle permanent du glacier à l’aide de satellites », a-t-il expliqué. « Les résultats démontrent que le glacier est effectivement sujet à des mouvements, ce qui peut bien entendu mener à la formation d’un lac en altitude, mais pour le moment la température sur place est de -15 °C, il n’y a par conséquent aucune raison de s’inquiéter. » Et de conclure en se voulant rassurant que « la situation actuelle ne constitue pas une menace ».
Traduit du russe par Pierre-François Hubert
Édité par Nicolas Ropert
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