Au Kirghizstan, Oumoutai Dauletova est l'une des figures du militantisme féministe. Elle lutte depuis plusieurs années pour défendre l'égalité femmes hommes, dans cette société encore très conservatrice.
Dans une société kirghize patriarcale et bourrée de stéréotypes, les féministes sont généralement vues d’un mauvais œil, critiquées et cataloguées. Malgré tout, certains les admirent, les soutiennent et s’en inspirent. Oumoutai Dauletova est l’une de ces féministes hors du commun. Elle travaille pour le Programme des Nations unies pour le développement et est très présente sur les réseaux sociaux. Kaktus.media a brossé avec elle en mars dernier le portrait des Kirghizes d’aujourd’hui et discuté de la manière dont les choses pouvaient changer au Kirghizstan.
Kaktus.media : Quand et comment avez-vous commencé à vous intéresser aux questions de genre ?
Oumoutai Dauletova : Je ne travaille pas depuis aussi longtemps qu’on pourrait le croire. J’ai reçu une formation de professeur d’anglais et de littérature. Après mes études, j’ai un peu travaillé à l’université puis j’ai appris à travailler avec les médias au centre Ernis Mamyrkanov. Ensuite, je suis devenue traductrice freelance. J’ai travaillé avec de nombreuses organisations et j’ai été traductrice pour le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) lors des événements d’Andijan, en 2005. J’ai dû me spécialiser dans de nombreux domaines.
Après mon déménagement à Bichkek, j’ai commencé à travailler pour Médecins sans frontières (MSF) qui se rend régulièrement dans les prisons. J’ai travaillé six ans avec les prisonniers. C’est mon épuisement au travail qui a été à l’origine de ma reconversion.
J’ai alors envoyé mon CV à différentes organisations. En 2011, ONU Femmes venait tout juste d’être créé et cherchait des spécialistes en communication. Quand on m’a fait passer l’entretien d’embauche, j’ignorais tout des questions de genre. On m’a demandé d’expliquer ce qu’était l’égalité des sexes, quelles mesures il fallait prendre pour l’atteindre et j’ai répondu intuitivement.
De par mon travail, j’étais en lien étroit avec les mouvements féministes. C’est comme ça que je me suis retrouvée dans une réunion féministe à Bichkek avec Selbi Djumaevoï, Aizat Chakevoï et beaucoup d’autres. Rien qu’en les fréquentant pendant un an et demi, j’ai compris ce qu’était le genre. Le mouvement féministe et la société civile sont les porteurs de ce savoir. C’est alors qu’est née l’idée du mouvement « Ensemble contre les violences » qui comprend aujourd’hui une quarantaine d’organisations.
Quelques années plus tard, j’ai commencé à travailler pour le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et je suis maintenant coordinatrice du programme national sur le genre.
Vous êtes relativement connue au Kirghizstan grâce à vos publications sur Facebook qui suscitent beaucoup de débat. Elles ne sont pas aussi neutres que ce que l’on a pris l’habitude de voir émanant d’organisations internationales. Comment séparez-vous votre rôle de salariée et celui d’activiste ?
Il m’est difficile de séparer ces deux sphères car l’activisme est toujours présent en . . .
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