Accueil      Une agence de l’énergie atomique créée au Kazakhstan

Une agence de l’énergie atomique créée au Kazakhstan

Une agence de l'énergie atomique a été créée au Kazakhstan. Elle aura pour but de mener à bien la construction des centrales nucléaires dont la création a été décidée par référendum.

Rédigé par :

Samad Alizade 

Centrale nucléaire Kazakhstan Énergie Écologie
Le Kazakhstan prévoit de construire plusieurs centrales nucléaires (illustration). / Photo: Pexels.

Une agence de l’énergie atomique a été créée au Kazakhstan. Elle aura pour but de mener à bien la construction des centrales nucléaires dont la création a été décidée par référendum.

Kassym-Jomart Tokaïev a signé le 18 mars dernier un décret pour la création d’une agence de l’énergie atomique. L’ancien ministre de l’Energie du pays a été désigné à la tête de l’agence, qui dépend directement du chef de l’État. Elle sera chargée de mener à bien la construction des premières centrales nucléaires du pays après la décision prise par la nation lors d’un référendum.

Le président a annoncé cette initiative lors de la quatrième réunion du kurultai national, le 14 mars dernier. Il a déclaré également que trois centrales nucléaires devraient être construites au Kazakhstan.

Il a motivé cela par le fait qu’il est « stratégiquement important pour le pays de créer une nouvelle industrie énergétique qui fournira une base solide pour le développement économique dynamique pour les décennies à venir », détaille Radio Azattyq, la branche kazakhe du média américain Radio Free Europe. L’emplacement de la première centrale avait déjà été décidé le 30 décembre dernier et rendu public le 25 février.

Les préparations pour une première centrale nucléaire dans le pays

Le Kazakhstan est rentré dans le bal nucléaire suite à un référendum lors duquel 71 % de la population aurait voté « pour », accompagné pourtant de rapports d’observateurs sur les violations du processus de vote, relayés par exemple par Radio Azattyq.

Le décret envisage aussi le transfert à l’agence des fonctions et des pouvoirs du ministère de l’Energie de la République du Kazakhstan dans le cadre de certaines missions désignées, notamment en termes d’extraction d’uranium, d’utilisation de l’énergie atomique, pour la garantie de la radioprotection de la population et l’exploitation de la zone de sécurité nucléaire de Semipalatinsk.

Lire aussi sur Novastan : Kazakhstan : une zone de sûreté nucléaire va être créée sur le territoire de Semipalatinsk

C’est donc l’une des étapes primordiales pour la réalisation du projet nucléaire dans le pays. L’agence sera dirigée par Almasadam Sätqaliev, désormais ex-ministre de l’Energie de la République. L’entreprise qui dirigera la construction n’est pas encore clairement désignée. Astana avait déclaré qu’elle examinait les demandes d’entreprises de Russie, de Chine, de Corée du Sud et de France pour la construction d’une centrale nucléaire au Kazakhstan.

Auparavant, Almasadam Sätqaliev avait déclaré qu’au cours du premier semestre 2025, une décision serait prise sur les participants du consortium qui sera chargé de la construction de la centrale nucléaire, rapporte le média kazakh Vlast. Selon lui, les entreprises devraient fournir au Kazakhstan des propositions qui optimisent les approches en termes de délais et de coûts.

Pourquoi l’option nucléaire ?

Cette transition est motivée par des préoccupations en matière de sécurité énergétique. Bien que ce pays dispose de réserves importantes de combustibles fossiles, il fait face à des pénuries d’énergie. Ce problème est dû au décalage entre les capacités de traitement du gaz et la croissance de la demande. Riche en pétrole, métaux rares et producteur de près de la moitié de l’uranium mondial, le pays espère grâce au nucléaire combler enfin son déficit chronique d’énergie, notamment dans le Sud où vit la moitié des quelques 20 millions de Kazakhs.

Le projet nucléaire peut aussi être considéré comme une méthode pour réduire la dépendance énergétique face à la Russie, qui se manifeste notamment dans le pétrole, Kassym-Jomart Tokaïev cherchant des sources que le pays pourrait exploiter librement. Dans ce cas-là, l’inquiétude des experts concernant la participation de Rosatom dans le projet serait justifiée.

Partenariat nucléaire, partenariat politique

Le chef de la nouvelle agence a également déclaré que les approches de base pour la construction d’une centrale nucléaire suggèrent une conception en trois ans, puis une construction qui, « du premier coulage de béton jusqu’à la fin de la première unité », prendrait de huit à 14 ans, rapporte Radio Azattyq.

Des approches « inacceptables » selon lui : « Nous devons organiser notre travail de manière à développer nos compétences afin de pouvoir utiliser toute l’expérience internationale avancée. Et de réaliser un très bon travail détaillé avec les fournisseurs pour présenter des propositions de haute qualité, afin que nous puissions commencer à concevoir, construire et commander des équipements dans un avenir proche. »

Envie de participer à Novastan ? Nous sommes toujours à la recherche de personnes motivées pour nous aider à la rédaction, l’organisation d’événements ou pour notre association. Et si c’était toi ?

Ce partenariat aura également une valeur politique significative. Des personnalités publiques et des politologues expriment leur inquiétude quant au fait que la centrale nucléaire soit construite par la Russie, ce qui pourrait aggraver la dépendance énergétique du Kazakhstan vis-à-vis de ce voisin.

La Chine ne doit pas non plus être écartée en tant qu’acteur important. Un jour seulement avant de signer la création de l’agence pour l’énergie nucléaire, le président a reçu le PDG de la Compagnie nucléaire nationale chinoise (CNNC), Shen Yanfeng. Il a souligné que le pays était « intéressé par l’expérience significative de la CNNC, le fleuron de l’industrie chinoise de l’énergie nucléaire ».

La France, premier importateur d’uranium

Le Kazakhstan est le premier producteur d’uranium naturel au monde. La production d’uranium du groupe public kazakh d’extraction d’uranium et d’énergie nucléaire Kazatomprom a augmenté de 10 % en 2024 pour atteindre 23 270 tonnes d’octaoxyde de triuranium, la forme la plus stable d’oxyde d’uranium. C’est un matériau important qui trouve une application dans l’industrie nucléaire et des semi-conducteurs.

Le Kazakhstan est également le plus important exportateur d’uranium pour la France. D’ailleurs, les exportations de métaux non ferreux vers la France, dont fait partie l’uranium, ont augmenté de 18,6 % en 2024 – bien que cette augmentation puisse être due à la hausse des prix. Ainsi, la France est aussi naturellement intéressée à participer à ce projet.

Le ministère de l’Energie du Kazakhstan avait annoncé en décembre dernier négocier avec la France pour la construction de la première centrale. Ces négociations menées avec Electricité de France (EDF), sa filiale Framatome et Arabelle Solutions, fournisseur de turbines pour des réacteurs, sont le premier pas concret un mois après la proposition du président français Emmanuel Macron d’aider le Kazakhstan dans le domaine du nucléaire civil.

Lire aussi sur Novastan : L’uranium kazakh au coeur d’un nœud géopolitique

« La partie française s’est déclarée prête à accompagner le Kazakhstan dans la mise en œuvre du projet de construction de centrale nucléaire », indique un communiqué du ministère kazakh de l’Energie, après des entretiens à Paris du 4 au 6 décembre dernier.

Des risques écologiques ?

Le référendum au Kazakhstan a marqué une période de tension. De nombreux écologistes sont toujours contre le nucléaire civil dans le pays, affirmant qu’il affectera négativement le lac Balkhach. En effet, le site choisi pour la construction de la toute première centrale nucléaire est le district de Djamboul, dans la région d’Almaty, près du plus grand lac du pays.

Lire aussi sur Novastan : Au Kazakhstan, débat autour d’une centrale nucléaire sur les rives du lac Balkhach

L’une des raisons de ces inquiétudes pourrait être liée aux conséquences encore présentes des essais nucléaires sur le site de Semipalatinsk. Une étude d’un bulletin de scientifiques atomiques montre que les habitants de cette région souffrent de 25 à 30 % plus de cancers que dans le reste du pays. D’autres rapports sont également disponibles, tous décrivant le tribut que ces tests ont fait payer aux générations à venir. Cependant, une centrale nucléaire ne présente pas en soi de menace écologique directe ni de risques sanitaires. Les centrales nucléaires ne brûlent pas de combustibles fossiles et n’émettent donc pas directement de dioxyde de carbone.

Envie d'Asie centrale dans votre boîte mail ? Inscrivez-vous gratuitement à notre newsletter hebdomadaire en cliquant ici.

Une défaillance du confinement peut entraîner un risque catastrophique, ce qui, dans les réacteurs nucléaires, est provoqué par la fusion des combustibles surchauffés et le rejet de grandes quantités de produits de fission dans l’environnement. Si les centrales fonctionnent normalement, elles rejettent moins de matières radioactives que les centrales au charbon, dont les cendres volantes contiennent des quantités importantes de thorium, d’uranium et de leurs nucléides de filiation.

Cependant, une grande centrale nucléaire peut rejeter de la chaleur résiduelle dans un plan d’eau naturel, ce qui peut entraîner une augmentation indésirable de la température de l’eau et nuire à la vie aquatique.

Samad Alizade
Rédacteur pour Novastan

Relu par Léna Marin

Merci d’avoir lu cet article jusqu’au bout ! Si vous avez un peu de temps, nous aimerions avoir votre avis pour nous améliorer. Pour ce faire, vous pouvez répondre anonymement à ce questionnaire ou nous envoyer un email à redaction@novastan.org. Merci beaucoup !

Commentaires

Votre commentaire pourra être soumis à modération.