Sous protectorat russe depuis la fin du XIXème siècle, le khanat de Khiva et l’émirat de Boukhara vont faire les frais de l’arrivée des Bolcheviks. Les deux monarchies, présentes depuis le XVIème siècle, seront renversées par des soulèvements communistes en 1920 à Khiva. À l’occasion du centenaire de cet évènement, Sergey Kuznim, chercheur spécialisé sur cette période, en raconte les détails.
Novastan reprend et traduit ici un article publié le 14 février 2020 par le média russe spécialisé sur l’Asie centrale Fergana News.
Les années 1870 voient l’Empire russe lancer d’importantes conquêtes militaires en Asie centrale, en particulier en direction du khanat de Khiva et de l’émirat de Boukhara, sur le territoire de l’actuel Ouzbékistan. À partir de 1873, les deux États perdent leur indépendance et finissent sous protectorat russe. Cependant, les révolutions russes de 1917 modifient l’ordre établi. Sous l’impulsion des Bolcheviks, l’idéologie soviétique s’installe peu à peu dans les deux monarchies avant que l’Armée rouge ne renverse définitivement leurs régimes.
En février 1920, la République populaire de Khorezm est proclamée à Khiva. Elle est suivie en octobre de la même année par la naissance de la République populaire de Boukhara.
Sergey Kuznim, chercheur principal à l’Institut d’orientalisme de l’Académie russe des sciences, s’entretient ici au sujet de la souveraineté de ces nouveaux États et leur soutien populaire.
Fergana News : De la moitié du XIXème siècle jusqu’en 1917, le khanat de Khiva et l’émirat de Boukhara se trouvaient sous protectorat russe. Quelles transformations ont connu ces États au cours de cette période, notamment par rapport aux autres territoires d’Asie centrale qui furent placés sous contrôle direct de l’Empire russe?
Sergey Kuznim : Après que le khan de Khiva et l’émir de Boukhara se sont déclarés vassaux de l’empereur russe, leurs monarchies ont été reconnues comme protectorat, et n’ont pas été intégrées dans la fédération d’États. Cela a peu impacté l’ordre social existant. L’autorité des monarques et du clergé en place ne fut pas remise en cause par les populations. La monarchie conservait alors sa légitimité traditionnelle auprès de ses sujets. Certes, certains cas de décisions arbitraires de la part des seigneurs féodaux ont pu attiser des tensions avec la population, mais sans que l’ordre social ne soit remis en cause. Cependant, d’autres conflits intérieurs, qu’ils soient interethniques (notamment entre Ouzbeks et Turkmènes) ou économiques et sociaux (l’accès à l’eau) étaient d’actualité. Les deux monarchies ont vu leurs positions confortées sous l’autorité de l’empereur russe. Plusieurs exemples concrets témoignent de cette amélioration : l’abolition de l’esclavage, la stabilisation des conflits intérieurs, la construction du chemin de fer reliant la Russie à Boukhara ou encore le développement de routes et des canaux au service de l’industrie.
Au même moment, des colonies russes sont apparues sur le territoire des deux monarchies, qui allaient par la suite devenir des noyaux de contestations révolutionnaires. Comparées aux autres régions d’Asie centrale qui appartenaient à l’Empire russe, Khiva et Boukhara ont pu maintenir en grande partie leur indépendance, bien qu’elles n’aient pas acquis le statut d’États indépendants.
Pourquoi, selon vous, le gouvernement tsariste, qui a programmé la chute du khanat de Kokand, n’a-t-il pas agi de la même manière avec Khiva et Boukhara ? Pourquoi Saint-Pétersbourg avait-il besoin de ces formes étatiques ?
Les dirigeants russes ont jugé que l’émir de Boukhara et le khan de Khiva étaient suffisamment dépendants et loyaux envers l’empereur russe. Les deux monarchies ont toujours respecté les intérêts économiques de la Russie. La relative stabilité intérieure à Khiva et à Boukhara garantie par la Russie contribuait, par effet de « zones-tampon », à garantir la sécurité des provinces du sud de la Russie. Il est difficile de dire si l’Empire russe envisageait d’intégrer ces territoires par la suite, les recherches historiques n’ayant pas révélé de telles intentions.
Lire aussi sur Novastan : L’histoire oubliée de Chakhrisabz, ancienne ville farouchement indépendante
Concernant le khanat de Kokand (1709-1876), la situation était très différente de celle de Khiva et de Boukhara au cours des dernières années de son indépendance. Le monarque légitime, Khudayar Khan, était loyal envers la Russie. Cette relation a créé des mécontentements. La population s’est soulevée contre lui, ce qui l’a forcé à prendre la fuite, aidé par les Russes. Les rebelles choisirent son fils Nasreddin pour lui succéder. À la suite de la défaite des insurrections, le général von Kaufmann (commandant en chef des troupes russes du district militaire du Turkestan, ndlr) signe avec le nouveau khan un traité d’union. Kokand est devenu un protectorat russe, comme Khiva et Boukhara, mais les troubles ont perduré et Nasreddin s’est enfui, lui aussi sous la protection des Russes. Après la prise de Kokand, le khanat a disparu. Cela est principalement dû aux soulèvements du peuple contre le khan, et pas directement aux décisions de la Russie.
Les évènements politiques et sociaux qui ont précédé la chute des monarchies à Khiva et à Boukhara sont-ils similaires aux processus alors en cours au sein de l’Empire russe ou sont-ils fondamentalement différents?
Les processus politiques à l’œuvre diffèrent de ceux de la Russie, même s’ils partagent une similarité de taille : ces sociétés étaient traditionnellement monarchiques et les autorités politiques, tant dans l’Empire russe qu’à Khiva et Boukhara, cherchaient, par des réformes lentes et prudentes, à préserver ce traditionalisme. Bien sûr, avec des différences dans les contextes historiques, religieux et nationaux.
Les sociétés de Boukhara et de Khiva étaient dans l’ensemble plus conservatrices, plus religieuses et moins infiltrées par les idées révolutionnaires. Ces idées leur étaient étrangères à l’origine, tout comme elles ont pu l’être en Russie. Il est bien connu que les idées révolutionnaires se sont propagées de l’Ouest vers la Russie. Elles se sont ensuite transmises à Khiva et Boukhara, d’une part par l’intermédiaire de différents partis communistes et de l’autre par les Jadidistes. Mais le mouvement jadidiste (mouvement réformiste nationaliste musulman dans l’Empire russe, inspiré par des idées occidentales de modernité, ndlr) s’est lui-même développé parmi les musulmans russes, grâce aux influences étrangères : celles des idées politiques européennes et des Jeunes Turcs. Toutes ces idées partageaient un point commun : introduites de l’extérieur, elles avaient pour fin le renversement des sociétés traditionnelles et l’abolition des monarchies.
Les Soviétiques, tout comme le gouvernement provisoire, se sont empressés de reconnaître à la fois le khanat et l’émirat. Quel était le calcul des Bolcheviks ?
Je pense que c’était le même raisonnement que pour la reconnaissance d’autres États, où ils ont également mené avec succès des révolutions socialistes. Quand les Bolcheviks ont exporté la révolution, ils ont dit qu’elle était orchestrée par le peuple (ce qui n’était pas le cas). À cette fin, des partis ou des groupes communistes ou pro-communistes ont été créés en secret dans certains États, et incluaient nécessairement des représentants des populations. Ces partis ont ensuite tenté de prendre le pouvoir et, s’ils échouaient (comme dans les monarchies d’Asie centrale), en appelaient au soutien des Bolcheviks.
L’Armée rouge est venue remplir ce qu’on appelle le « devoir international”. En conséquence, le pouvoir a été transféré à ces partis alors dirigés par les Bolcheviks. Ainsi, une partie des républiques s’est alliée non pas avec l’Empire russe, mais avec l’URSS, avec laquelle elle partageait déjà une base idéologique commune. Ce plan a été plus efficace qu’une conquête extérieure, qui aurait donné lieu à la création d’un parti bolchevik et à la révolution.
Peut-on dire que les destins de Khiva et Boukhara ont été déterminés par leurs voisins bolcheviks ? Quelle a été la « ligne de conduite générale du parti » vis-à-vis des monarchies de l’Est et a-t-on envisagé de la maintenir sous quelque forme que ce soit ?
À cette époque, les Bolcheviks ont tenté d’exporter la révolution dans le monde entier. Les États qui se trouvaient sur l’ancien territoire de l’Empire russe et des pays voisins étaient dans une position particulièrement sensible. Le khanat de Khiva et l’émirat de Boukhara ont envahi le territoire de l’ancien Empire russe, de l’Afghanistan à la mer d’Aral. À l’époque tsariste, ils entretenaient de bonnes relations avec la Russie qui leur apportait son soutien en retour. Sous les Bolcheviks, ils étaient considérés comme une division étrangère entre les régions rouges. Les monarques et le traditionalisme, surtout à Boukhara, sous l’influence de l’islam, étaient considérés comme une menace par les communistes. La « ligne du parti » consistait à créer et à soutenir les partis communistes (y compris les partis armés) afin d’exporter la révolution. L’émirat de Boukhara et le khanat de Khiva étaient donc condamnés.
L’expédition contre Boukhara en 1918 était-elle une initiative des Bolcheviks locaux ou a-t-elle été autorisée par le centre ? Pourquoi s’est-elle soldée par un échec ?
Fjodor Kolesov était le président de la République soviétique du Turkestan (un ancien État formé par la révolution bolchevik de 1918, faisant suite au Turkestan de l’Empire russe, ndlr) et représentait donc lui-même le centre. Il a notamment négocié avec Fayzoulla Khodjaïev, un membre du comité central du parti des jeunes boukhariotes (qui deviendra le premier chef de gouvernement de la République socialiste soviétique d’Ouzbékistan, ndlr). L’exportation de la révolution a été planifiée selon le schéma que j’ai déjà décrit. Fjodor Kolesov avait confiance dans les jeunes boukhariotes : il s’attendait à ce que l’invasion déclenche une révolte massive et que l’armée de l’émir soit faible. La campagne s’est terminée par un échec parce que Fjodor Kolesov et Fayzoulla Khodjaïev n’avaient pas réunis assez de force. En outre, Fayzoulla Khodjaïev a écrit plus tard, à juste titre, que l’attaque des rouges et des jeunes boukhariotes sur Boukhara était perçue par la population comme une invasion extérieure, ce que cette campagne était en réalité. Le peuple a alors préféré soutenir son monarque.
La présence de Djounaïd Khan sur la scène politique de Khiva a-t-elle accéléré ou prolongé l’agonie du khanat ? Peut-on comparer son rôle avec celui du baron Ungern dans l’histoire de la Mongolie ? Boukhara avait-elle un tel « héros » ?
Je pense que les Bolcheviks auraient de toute façon détruit le khanat de Khiva. Bien sûr, Djounaïd Khan (dernier dirigeant de Khiva avant sa chute aux mains des Bolcheviks en 1920, ndlr) a contribué à renforcer le conflit entre l’Ouzbékistan et le Turkménistan, mais certains Turkmènes se sont également révoltés. L’assassinat du monarque légitime Asfandiar-Khan sur son ordre et l’introduction d’hommes de paille à sa place n’ont pas contribué à la consolidation de la société. Mais Djounaïd Khan était certainement l’un des plus efficaces adversaires des Bolcheviks.
Lire aussi sur Novastan : Khwarzem et Boukhara, deux foyers anciens des juifs d’Asie centrale
Il n’y a pas lieu de faire une analogie entre le baron Ungern (commandant d’un sous-groupe de l’Armée blanche en Extrême-Orient de la Russie, qui a occupé la Mongolie extérieure au début de 1921, ndlr) et Djounaïd Khan. Ungern a libéré la Mongolie des envahisseurs chinois et rétabli le monarque légitime Bogdo Gegen VIII. Sans cela, la Mongolie serait restée sous occupation chinoise et n’aurait pas acquis son indépendance. Pendant son séjour en Mongolie, Bogdo Gegen n’était pas sa marionnette et Ungern n’a pas agi comme un dictateur mongol. La politique mongole de l’époque était dictée par Bogdo Gegen, et non par Ungern. Djounaïd Khan a été à juste titre combattu par différentes factions à Khiva (Ouzbeks, Turkmènes, etc.), tandis qu’Ungern n’a été combattu que par une poignée de révolutionnaires mongols liés à des Bolcheviks. Mais il y a un point commun dans l’histoire de Khiva et de la Mongolie. La révolution a été exportée vers la Mongolie par les Bolcheviks avec l’aide du parti populaire mongol, tout comme à Khiva, avec l’aide des jeunes khivares. Tant en Mongolie qu’à Khiva, ces partis ont permis l’invasion des troupes soviétiques, le tout supervisé par les Bolcheviks.
À Boukhara, je ne vois pas de tel héros. L’exportation de la révolution et l’adhésion à l’URSS a suivi le même schéma qu’à Khiva. Pour autant, les destins des monarques de Mongolie, de Khiva et de Boukhara étaient différents : Bogdo Gegen, privé du pouvoir de l’État, a été autorisé à vivre dans son pays en tant que monarque désigné jusqu’à sa mort, l’émir de Boukhara a pu fuire en Afghanistan et est mort en exil. Le sort du khan de Khiva a été plus tragique: il a été arrêté, déporté en Ukraine et y est mort de privations et de maladie.
Comment les Bolcheviks ont-ils justifié leurs opérations militaires contre les deux pays ? La Russie soviétique a-t-elle rompu ses accords avec les dirigeants ouzbeks ?
Les raisons étaient sensiblement les mêmes partout : le soutien militaire aux populations. À Khiva, pour que le peuple pacifique gagne contre Djounaïd Khan ; à Boukhara, en faveur des rebelles communistes et des jeunes boukhariotes, « représentants » des intérêts du peuple. Comme l’indique l’ordre du commandant de l’armée soviétique Mikhaïl Frounze, l’objectif est de « venir en aide au peuple de Boukhara avec toute notre puissance armée ». En fait, il s’agissait d’une agression communiste visant à renverser le pouvoir légitime dans d’autres États et à transférer le pouvoir aux mains des Bolcheviks.
Khiva et l’armée de Boukhara avaient-ils les moyens d’opposer une résistance à l’Armée rouge ? Comment se sont déroulées les opérations militaires ? La partie était-elle gagnée d’avance pour les troupes de Frounze ?
Le Khanat de Khiva et l’émirat de Boukhara étaient, bien sûr, incapables de résister à l’Armée rouge. L’émir de Boukhara a essayé de créer une véritable armée, mais a manqué de temps et de ressources. Néanmoins, les opérations militaires de Mikhaïl Frounze contre Boukhara, malgré leur préparation, n’ont pas été si simples. Selon les souvenirs de l’émir Alim Khan, la guerre n’a pas été déclarée, l’attaque a eu lieu soudainement. Néanmoins, la première attaque de l’Armée rouge sur Boukhara a été repoussée. Il s’est avéré que les révolutionnaires de Boukhara s’étaient trompés sur les velléités insurrectionnelles du peuple – c’est ainsi que Mikhaïl Frounze le formule. L’attaque contre la capitale a commencé le 30 août et s’est terminée le 2 septembre 1920. L’artillerie et les bombardements aériens de la forteresse, des zones résidentielles et des mosquées ont joué un rôle décisif. Des grenades chimiques ont également été utilisées. L’attaque a fait de nombreuses victimes. Les troupes bolcheviques ont ensuite pillé la ville.
Ne pensez-vous pas que la période de l’indépendance de Khiva et de Boukhara dans le cadre de l’Empire russe et la guerre civile ont été peu traitées par l’historiographie soviétique et post-soviétique ? Quelles sources historiques datant de cette époque sont-elles dignes d’intérêt et de confiance ?
Tout d’abord, le terme guerre civile est-il vraiment approprié dans ce cas ? Une guerre civile dans l’Empire russe, puis en République populaire russe ? Et puis qu’en est-il de Khiva et Boukhara, qui n’en faisaient pas partie ? Les indépendances de Khiva et de Boukhara ont été officiellement reconnues par le gouvernement provisoire, puis par le Conseil des commissaires du peuple. Il n’y a pas eu de guerre civile à Khiva et Boukhara, mais une intervention communiste étrangère. Je ne crois pas que cette période soit un angle mort, mais elle mériterait certainement des enquêtes plus approfondies.
Lire aussi sur Novastan: L’Asie centrale soviétique (1/2)
Une attention particulière devrait être accordée aux documents et aux mémoires des deux parties. Malheureusement, en Russie (et dans un certain nombre d’autres pays post-socialistes, comme la Mongolie), seules les mémoires des partis victorieux ont été largement préservées. Et tandis que les émigrants russes ont laissé des traces importantes de cette époque, il y a beaucoup moins de souvenirs similaires de l’Asie centrale. À l’époque soviétique, de nombreux documents idéologiquement divergents ont été détruits dans les archives. Il est impossible de dire a priori quels documents et mémoires méritent le plus de confiance. Quoi qu’il en soit, le fait que certains documents aient été publiés à plusieurs reprises et qu’ils soient largement reconnus ne signifie pas que ce matériau est forcément fiable. Il est nécessaire d’analyser, d’examiner et de comparer différents matériaux, différents points de vue. Il est nécessaire de suivre une démarche scientifique, de mettre à jour les mythes historiques et de découvrir les contrefaçons. Tout intérêt national ou politique n’est pas un critère de vérité et de fiabilité dans la science. C’est d’une importance fondamentale.
Natalia Nikitina
Journaliste pour Fergana News
Traduit du russe par Hannah Riedler
Traduit de l’allemand par Flora Perez
Édité par Louise Duplenne
Relu par Anne Marvau
etoilerouge6, 2020-05-18
Absence totale de la guerre dite »civile » de 1918 à 1920 ds l’ex empire russe dont KHIVA et Boukara faisait partie puisque ss autorité russe et meme des colonies. Cependant de quel coté se sont portés les émirs et autres féodaux? Du coté des blancs et des troupes étrangères américaines et de 14 pays occidentaux et JAPON .Ne parlons pas des émirs et autres personnages mais parlons de la situation sans avenir des peuples de cette région et du bond ds le monde moderne qu’elles firent grace au socialisme , femmes incluses ce qui était unique alors en pays musulman. Sans parler de l’analphabétisme et du soutien militaire de la FRANCE contre la Révolution des peuples de Russie. Oubliée la guerre des occidentaux contre les bolcheviks alors et de ce général américain se vantant de tuer 100 bolcheviks pour un de ses soldats? Qui les a appelés, qui les a soutenus? Que faisait l’émir féodal? Ce serait bien honnete d’en parler. Ainsi que du développement de l’OUZBEKISTAN qui s’en suivit tout en protégeant les monuments , la culture et la langue ouzbèke. Aujourd’hui c’est le développement des affairistes avec les corrompus de FRANCE qui ne paye que peu ou pas d’impot mais font les beaux en ouzbekistan.
Reply