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Élections législatives au Tadjikistan : le parti du président obtient la majorité absolue

Le Tadjikistan a voté : le Parti démocratique populaire a obtenu plus de 50 % des voix lors du second tour des élections législatives organisées le 1er mars dernier. Deux formations d’opposition admises au scrutin n’ont pas franchi le seuil électoral de 5 %.

Tadjikistan Elections législatives 1er mars 2020 Résultats
Les élections législatives au Tadjikistan ont été sans surprise.

Le Tadjikistan a voté : le Parti démocratique populaire a obtenu plus de 50 % des voix lors du second tour des élections législatives organisées le 1er mars dernier. Deux formations d’opposition admises au scrutin n’ont pas franchi le seuil électoral de 5 %.

Novastan reprend et traduit ici un article publié le 3 mars 2020 par notre version allemande.

Le 1er mars dernier, les citoyens tadjiks étaient appelés à élire non seulement les membres des Parlements régionaux et des conseils municipaux, mais aussi les représentants de la chambre basse du Parlement.

Le Parlement national est en effet composé de deux chambres : les membres du Conseil national sont nommés par les Parlements régionaux et le président, tandis que les 63 députés de la chambre basse sont élus directement par les citoyens.

Des résultats prévisibles

Les résultats présentés dans l’après-midi du 2 mars par le chef de la commission électorale, Bakhtior Tchoudoïorsoda, et rapportés par le média tadjik Asia-Plus, n’ont surpris personne. Le Parti démocratique populaire du Tadjikistan, au pouvoir, a remporté 50,4 % des secondes voix, dépassant de loin le Parti des réformes économiques (16,61 %), le Parti agraire (16,5 %), le Parti socialiste (5,15 %) et le Parti démocratique (5,1 %), qui sont également représentés au Parlement.

Le Parti communiste (3,1 %) et le Parti social-démocrate (0,32 %) n’ont pas réussi à franchir le seuil électoral des 5 %. Les militants communistes bénéficient cependant du fait que 41 des 63 députés sont élus directement par les circonscriptions. Asia-Plus explique en effet que le président du parti, Mirodj Abdoullaïev, l’a emporté dans sa circonscription. Le Parti social-démocrate est donc le seul parti d’opposition admis aux élections qui ne sera pas représenté au Parlement national.

La répartition exacte des sièges ne sera connue que lorsque les 41 circonscriptions directes auront rendu leur verdict. D’après le média russe Fergana News, la majorité des Tadjiks s’attendent à ce que le parti au pouvoir obtienne au moins deux tiers des sièges.

Un Parlement docile

Bien que six des sept partis admis au scrutin seront représentés au Parlement, le président Emomalii Rahmon ne devrait rencontrer aucune difficulté à poursuivre sa politique. Lors d’une table ronde organisée par Radio Ozodi, la branche tadjike du média américain Radio Free Europe, les dirigeants de la majorité des partis se sont déclarés dans l’opposition, sans toutefois pouvoir expliquer clairement leurs divergences avec le gouvernement actuel.

Les sociaux-démocrates, en revanche, avaient tenu très tôt un discours critique en annonçant qu’ils ne croyaient pas à la transparence des élections, mais y participeraient pour « affirmer la volonté du peuple ». La participation du parti au scrutin avait en outre failli échouer en raison de la caution obligatoire de 5 800 somonis (580 euros).

Pour le politologue Parvis Moullodjanov, le Parlement ne joue qu’un rôle mineur dans la politique du pays. « Toutes les décisions politiques et économiques sont prises par le pouvoir exécutif et plus de 90 % des sièges sont occupés par des représentants du parti du président. Le Parlement n’est qu’un outil du pouvoir. Il détermine la stratégie et suit le cours de la politique générale, mais les décisions sont prises dans le bureau du président », a déclaré le spécialiste à Fergana News.

Des votes multiples

Avant même l’annonce des résultats, la commission électorale centrale avait annoncé n’avoir reçu « aucune plainte ou demande concernant des violations de la loi au cours du processus électoral ». Les observateurs de l’Organisation de coopération de Shanghai ont également qualifié l’élection de transparente et démocratique. « Les élections ont été conformes aux exigences de la législation électorale de la République et aux obligations internationales acceptées par le pays », a déclaré Nourlan Akkochkarov, Secrétaire général adjoint de l’organisation.

Cependant, des doutes demeurent. Dans un rapport préliminaire à l’élection, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a déclaré qu’elle ne voyait aucune valeur ajoutée à l’envoi d’une mission d’observation du scrutin, car « le respect des libertés fondamentales s’est encore détérioré depuis les dernières élections et le choix entre les alternatives politiques est limité en raison de l’absence de médias indépendants et d’une opposition qui fonctionne ». L’OSCE a néanmoins envoyé une petite mission d’observation à court terme, dont le rapport est toujours attendu.

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Les journalistes d’Asia-Plus, quant à eux, ont mené une expérience à Douchanbé, où ils ont tenté, avec succès dans plusieurs bureaux de vote, de voter à la place d’autres personnes.

« Lorsque j’ai soumis trois procurations pour des membres de ma famille, on m’a demandé si je voterais pour tous. J’ai dit oui. On m’a alors donné une liste où j’ai signé pour tous les membres de la famille et j’ai obtenu les bulletins de vote. […] J’ai voté pour tout le monde, puis j’ai glissé tous les bulletins ensemble dans l’urne, mais personne, pas même les observateurs, n’est intervenu », a déclaré l’un des journalistes.

Ce genre de cas, ainsi que l’absence de campagne électorale, montrent le peu d’intérêt des autorités pour des élections libres et démocratiques. Malgré le taux de participation officiel de 75,1 %, la société tadjike n’est que peu intéressée par la politique. « Les gens s’y intéressent quand ils pensent avoir ou devoir avoir une influence sur le processus politique, mais ce n’est pas le cas au Tadjikistan. On voit de plus en plus de citoyens actifs et potentiellement politisés quitter définitivement le pays, notamment dans le cadre du programme de réinstallation en Russie », résume Parvis Moullodjanov.

Robin Roth
Rédacteur en chef de Novastan

Traduit de l’allemand par Pierre-François Hubert

Corrigé par Aline Simonneau

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