Le nouvel objectif stratégique du Kazakhstan sur l’intelligence artificielle, au cœur de la modernisation numérique du pays, vise à renforcer sa souveraineté technologique et culturelle, mais se heurte à des défis scientifiques et juridiques majeurs.
Astana s’est lancé ce défi inédit pour les cinq prochaines années : former 500 000 écoliers, 300 000 étudiants, 90 000 fonctionnaires, 80 000 représentants d’entreprises et des milliers de citoyens d’autres domaines aux compétences en intelligence artificielle (IA) au cours des cinq prochaines année, rapporte The Astana Times.
L’objectif est de doter la population des compétences nécessaires pour répondre à l’automatisation croissante et à l’intégration de l’IA dans tous les secteurs. Au-delà de l’économie, le Kazakhstan veut préserver sa souveraineté linguistique et culturelle, une ambition portée par le ministère du Développement numérique, de l’Innovation et de l’Industrie aérospatiale, et s’inscrit dans la stratégie nationale de modernisation numérique.
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Souveraineté numérique et défis linguistiques
Le développement de modèles d’IA capables de traiter le kazakh et de refléter une vision locale est présenté comme un enjeu stratégique, selon The Diplomat. Le président Kassym-Jomart Tokaïev a plusieurs fois souligné l’importance de l’IA pour l’avenir du pays et la maîtrise de son espace informationnel. Mais le manque de données en langue kazakhe reste un obstacle majeur, freinant le développement de modèles performants.
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Le ministre Jasslan Madiev, ancien dirigeant de Binance Kazakhstan et fort d’une longue expérience dans la haute administration, mise sur une mobilisation de grande ampleur pour adapter la société à la transformation technologique. Son plan s’inscrit par ailleurs dans une dynamique régionale : l’Ouzbékistan a récemment intégré l’IA dans ses systèmes douaniers, tandis que le Kirghizstan a élargi les compétences de son ministère du Numérique à l’IA.
Des défis réglementaires et techniques majeurs
Ce vaste programme s’accompagne d’un encadrement législatif renforcé. Un projet de loi sur l’IA, s’inspirant notamment du futur AI Act de l’Union européenne, a été examiné depuis mars 2025 au Parlement. Il prévoit d’interdire les systèmes totalement autonomes sans supervision humaine et d’imposer la transparence sur le fonctionnement des algorithmes.
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Selon une étude académique récemment pré-publiée du journal scientifique Social Sciences & Humanities Open, les défis juridiques de la régulation de l’IA générative au Kazakhstan présentent de nombreuses similitudes avec ceux rencontrés dans l’Union européenne, notamment en matière de RGPD (le droit à la protection des données à caractère personnel), de transparence et de supervision humaine.
Le chantier juridique introduit aussi des mesures strictes de protection des données personnelles, un sujet sensible après la fuite de données de 16,3 millions de citoyens révélée ce mois-ci. Selon le ministre, la base de données gouvernementale n’a pas été récemment compromise, mais la circulation de données agrégées issues d’anciennes fuites demeure préoccupante.
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Former un million de Kazakhstanais à l’IA est un projet audacieux. Sa réussite dépendra de la capacité à mobiliser des ressources humaines et financières, mais aussi à garantir une cybersécurité et réglementation solides pour développer des outils adaptés à la langue et à la culture. Le pays entend ainsi se positionner comme un hub technologique régional, tout en affirmant son identité dans la course mondiale à l’industrie 4.0.
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Rédacteur pour Novastan
Relu par Léna Marin
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